en

en
en 1.
(an ; suivi d'une voyelle ou d'une h muette se prononce comme le substantif an ; mais, ce qui n'a pas lieu pour le substantif an, l'n s'appuie sur la voyelle qui suit : en avant, dites : an-na-van) prép.
   Préposition qui signifie à l'intérieur de, avec deux sens principaux desquels tous les autres dérivent, l'un exprimant le repos (renfermant les nos 1° à 7°), l'autre le mouvement (renfermant les nos 8° à 13°), en se prêtant également, suivant le mot qui le précède, au sens de repos et à celui de mouvement.
   À l'intérieur de, avec l'idée de repos. Être en France. En la ville de Paris. Renfermés en une place forte. En ces lieux agréables. Nous nous tenons en une chambre bien close.
   Je serai marié, si l'on veut, en Turquie, CORN. Ment. III, 5.
   Ces règles du raisonnement subsistent-elles aussi en quelque part, d'où elles me communiquent leur vérité immuable ?, BOSSUET Connaiss. IV, 9.
   C'est par leur paresse qu'ils laissent croître les ronces et les épines en la place des vendanges et des moissons, FÉN. Exist. de Dieu, 11.
   Un cuistre en son taudis compose une satire, VOLT. Ép. c..
   Dans la personne de.
   Pour faire dire encore aux peuples pleins d'effroi Que venir, voir et vaincre est même chose en moi, CORN. Pomp. IV, 3.
   J'aperçois Vinius, qu'on m'amène sa fille ; J'en punirai le crime en toute la famille, CORN. Oth. V, 1.
   Jésus-Christ en qui Adam n'avait point péché, BOSSUET Hist. II, 1.
   Vous n'êtes frappé que de ce qui brille au dehors, et vous comptez pour peu ce qui fait véritablement l'homme, c'est-à-dire ce qui est en lui et par conséquent à lui, ROLLIN Hist. anc. Oeuvres, t. II, p. 622, dans POUGENS.
   Si toutes les nations ont péché en Adam, VOLT. Philos. II, 191.
   Il est en moi, en lui, c'est-à-dire je possède, il possède la faculté de, le pouvoir de.
   Il est en toi de perdre ou de sauver ton frère, CORN. Héracl. V, 5.
   S'il a fait tout ce qui est en lui pour...., PASC. Prov. 8.
   Alexandre et Mahomet éteignirent autant qu'il était en eux le feu sacré des Guèbres, RAYNAL Hist. phil. V, 17.
   Par extension, en parlant du temps, en l'espace de. En un an. En deux ans. En si peu de temps. En moins d'un mois.
   Pendant. En hiver. En été. En l'an 300 de l'ère chrétienne.
   Dans ces temps bienheureux du monde en son enfance, BOILEAU Sat. v..
   Peut-être il se souvient qu'en un temps plus heureux...., RAC. Brit. II, 3.
   Il exprime la situation. En plaine. Je me trouvais en forêt, en plein champ. Il était en tête de la bande.
   Fig. Avoir quelqu'un en tête, l'avoir pour adversaire.
   Avoir quelque chose en tête, en être occupé.
   Sert à exprimer l'état, la manière d'être, la disposition, l'occupation. Être en affaires, en prière. Un portrait en pied. Être en guerre, en paix. Des cheveux en désordre. être en bonne santé, en appétit. Fenêtre en ogive. Fruits disposés en pyramide. S'habiller en turc. Se coiffer en cheveux. Regarder en pitié.
   De rage en leur trépas maudire la patrie, CORN. Hor. V, 3.
   Il n'y a rien qu'on ne fasse avaler, lorsqu'on l'assaisonne en louanges, MOL. l'Av. I, 1.
   Les autres religions sont plus populaires, car elles sont en extérieur, PASC. Rel. 2.
   [Le jeune homme] Est vain dans ses discours, volage en ses désirs, BOILEAU Art p. III.
   Mes révérends pères en Dieu, Et mes confrères en satire, BOILEAU Épigr. 35.
   En ce calme trompeur j'arrivai dans la Grèce, RAC. Andr. I, 1.
   Et peut-être, après tout, en l'état où je suis, RAC. Andr. I, 4.
   Traître, tu prétendais qu'en un lâche silence Phèdre ensevelirait ta brutale insolence, RAC. Phèd. IV, 2.
   En habit d'amazone, au fond de mes déserts Je te vois arriver plus belle et plus brillante Que la divinité qui naquit sur les mers, VOLT. Ép. CVI.
   Vous ne donnez point au génie le temps de se développer, de s'élever insensiblement, et d'aller en son vol toucher la voûte du ciel, GILB. Préf..
   Rois, colosses d'orgueil en délices noyés, A. CHÉN. 258.
   En hommes, en femmes, etc. se dit pour spécifier la qualité des personnes dans une assemblée. La réunion était nombreuse, mais, en ouvriers, il n'y avait que des menuisiers.
   Il n'y avait en femmes que Mme de Limours, Mme de Valée et la comtesse de Germeuil, Mme DE GENLIS Ad. et Théod. t. I, p. 439, dans POUGENS.
   Comme, de même que, en qualité de.
   Vous parlez en soldat, je dois agir en roi, CORN. Cid, II, 7.
   Qu'il triomphe en vainqueur et périsse en coupable, CORN. Hor. V, 2.
   Qu'il me faut craindre en maître, ou me chérir en père, CORN. Héracl. I, 2.
   Maurice ne l'obtint qu'en gendre de Tibère, CORN. Héracl. I, 2.
   Si vous m'aimez en soeur, faites-le-moi paraître, CORN. ib. V, 6.
   Mais si je lui dois tant en fils de souverain, Permettez qu'une fois je vous parle en Romain, CORN. Nicom. I, 2.
   Je veux parler en fille et je m'explique en reine, CORN. Oedipe, III, 2.
   Autrement qu'en tuteur sa personne me touche, MOL. Éc. des mar. II, 3.
   Je la regarde en femme aux termes qu'elle en est, MOL. Éc. des f. III, 1.
   Touchez à monsieur dans la main, Et le considérez désormais, dans votre âme, En homme dont je veux que vous soyez la femme, MOL. Femmes savantes, III, 3.
   Pharnace croit peut-être Commander dans Nymphée et me parler en maître, RAC. Mithr. I, 1.
   Je puis, quand je voudrai, parler en souveraine, RAC. Athal. II, 5.
   Et périssez du moins en roi s'il faut périr, RAC. ib. IV, 5.
   Gouverner en monarque et combattre en héros, VOLT. Sémir. II, 4.
   Si vous avez voulu me parler en ami, VOLT. Catil. I, 5.
   Mes ennemis riant ont dit dans leur colère : Qu'il meure et sa gloire avec lui ! Mais à mon coeur calmé le Seigneur dit en père : Leur haine sera ton appui, GILB. Imit. des psaumes..
   Elle s'était fait peindre en Madeleine, Mme DE GENLIS Mme de Maintenon, t. I, p. 49, dans POUGENS.
   En tant que, selon que, autant que, En tant que besoin sera.
   En tant que, comme. En tant qu'ennemis, il les combattit ; en tant que blessés, il veilla à leur salut.
   À l'intérieur de, vers l'intérieur de, avec mouvement. Mettre quelqu'un en prison. Monter en voiture. Aller en ville.
   Acheter sourdement l'esclave idolâtrée, Et la faire passer en une autre contrée, MOL. l'Étour. I, 9.
   Elle paraît simple à nos yeux ; Mais elle est fine, elle se cache ; Elle va souvent en des lieux Qu'elle ne veut pas que l'on sache, GOMBAUT Épigr. liv. III, dans RICHELET.
   Il court de mer en mer, aborde en lieu sauvage, LA FONT Filles de Minée..
   Il nous envoie son fils du ciel en la terre, BOSSUET Soumiss. 3.
   Le sort dont les arrêts furent alors suivis Fit tomber en mes mains Andromaque et son fils, RAC. Andr. I, 2.
   Allez en Albion, que votre renommée Y parle en ma défense, VOLT. Henr. I.
   En marque la direction.
   Elles avaient les yeux baissés en terre et le visage couvert d'un voile qui n'empêchait pas qu'on n'entrevît la rougeur que répandait sur leurs joues une pudeur virginale, ROLLIN Traité des Ét. liv. VI, 2e part. ch. 5.
10°   Indique un rapport de succession. D'aujourd'hui en huit. De point en point. Voltiger de fleur en fleur. De pis en pis.
11°   Marque la division, la distribution, la forme. Un poëme en quatre chants. Diviser une pomme en deux. Roulé en cercle.
12°   Fig. S'en aller en fumée. Éclater en pleurs. La chrysalide se change en papillon.
   Tu ne veux pas, grand roi, dans ta juste indulgence, Que cette liberté dégénère en licence, VOLT. Ép. c..
   En coupables propos si l'on peut s'exhaler, Doit-on faire une loi de ne jamais parler ?, VOLT. ib..
13°   Indique la destination, le motif, le but. Mettre en vente, en gage. Un temple changé en mosquée. En vue de plaire. En haine de. En considération de.
   Le peuple se soulève ou s'arme en ma défense, VOLT. Fanat. V, 2.
   Et aussi l'état avec mouvement, c'est-à-dire l'état dans lequel on entre. Se mettre en colère. Entrer en admiration. Être ravi en extase.
14°   En précède fort souvent le participe présent, et désigne alors le temps, l'époque, la manière. On apprend en vieillissant. Il dit en partant. Le mal va en augmentant.
   La tragédie, informe et grossière en naissant, N'était qu'un simple choeur...., BOILEAU Art p. III.
   De nos cailloux frottés il sort des étincelles, La lumière en peut naître ; et nos grands érudits Ne nous ont éclairés qu'en étant contredits, VOLT. Ép. c..
   Dans cette construction, pour qu'elle soit régulière et claire, il faut que en et le participe se rapportent au sujet de la phrase. Cependant, quand le sens ne souffre aucune ambiguïté, on peut ne pas l'y faire rapporter. L'appétit vient en mangeant.
   Mes crimes, en vivant, me la pourraient ôter [la vie céleste], CORN. Poly. II, 6.
   Tout en parlant de la sorte, Un limier le fit partir [le cerf], LA FONT. Fabl. VI, 5.
   Mes soins, en apparence épargnant ses douleurs, De son fils, en mourant, lui cachèrent les pleurs, RAC. Brit. IV, 2.
15°   En sert à former une foule de locutions adverbiales, comme : en avant, en dessus, en bas, en haut, en travers, en outre (voy. ces différents mots).
16°   En- préfixe, représente la préposition latine in, et donne au verbe le sens de aller dans, comme dans enfoncer ; ou un sens augmentatif, comme dans enchérir.
17°   En devient em en composition devant un p ou un b : embellir, empâter.
   1. Les grammairiens disent que en ne peut être employé pour exprimer la matière et que ma tabatière est en écaille, cette étoffe est en soie sont des phrases vicieuses, en place desquelles il faut mettre : ma tabatière est d'écaille, cette étoffe est de soie. Le fait est que l'Académie, qui ne parle pas de la difficulté, n'a aucun exemple de en signifiant la matière. Mais il est vrai aussi que l'usage de cette signification est très fréquent, et qu'on entend dire tous les jours une statue en marbre, une table en chêne, un mur en moellons, un pilier en bois, etc. Et c'est d'après cet usage vulgaire qu'on lit dans Arago, Notice sur le tonnerre, cité par Legoarant : Faisons cette pointe en fer.... Cinq poteaux en bois.... puis les cinq poteaux en bois dont j'ai parlé. à ces phrases récentes on peut ajouter celle-ci, plus ancienne, de Voltaire : De l'auguste raison les sombres ennemis Se plaignent quelquefois de l'inventeur utile Qui fondit en métal un alphabet mobile, Ép. c. Enfin, remontant encore davantage on en trouvera un exemple de Montaigne (en marbre). Ces différentes autorités portent à croire que en, ainsi employé, ne doit pas être rejeté.
   2. En présente des difficultés pour les articles. Quand la locution où en figure est tout à fait générale, en se construit sans article : en paix, en guerre, en soi, en nous. En se construit aussi avec un nom pris partitivement : en des temps tels que.... ; avec l'article indéfini un, une : en un lieu agréable ; avec un mot quelconque qui supplée l'article : en telle année, en cette situation, en quel temps, en quelque sorte, en ma volonté. Mais avec l'article défini le, la, les, il faut distinguer : d'abord il ne s'emploie jamais avec l'article pluriel, on ne dit pas en les circonstances, en les temps ; c'est un simple usage ; car il n'y a rien dans la préposition en qui répugne à l'emploi de les après elle ; et dans la locution ès lettres, ès est pour en les. Avec l'article au singulier on peut s'en servir dans quelques cas exceptionnels : en l'honneur de, en l'absence d'un tel, <
   Ce que Jésus-Christ est venu chercher du ciel en la terre, n'est-ce qu'un rien.... ainsi tout est vain en l'homme, si nous regardons ce qu'il donne au monde, BOSSUET Duch. d'Orléans..
   3. Il est beaucoup de cas où l'on peut employer indifféremment en ou dans ; et c'est alors l'oreille et l'harmonie de la phrase qui décident du choix. Voici des exemples :
   Ce cher parent fut heureux dans sa naissance, dans son mariage, en ses enfants, en ses emplois, PATRU .
   [Le jeune homme] Est vain dans ses discours, volage en ses désirs, BOILEAU Art p. III.
   Un danseur de corde ne fait que vouloir, et à l'instant les esprits coulent avec impétuosité tantôt dans certains nerfs, et tantôt en d'autres, FÉN. Exist. de Dieu..
   4. Dans le siècle de Louis XIV, on a dit communément en avec un nom de ville.
   Un désir.... De Tauris en Alep a causé ma venue, MAIRET Solim. I, 2.
   Il me prit envie d'aller en Babylone consulter quelque mage des disciples de Zoroastre, D'ABLANCOURT Lucien, la Nécromancie..
   Avant qu'avec toute autre on me puisse engager, Je serai marié, si l'on veut, en Alger, CORN. Ment. V, 6.
   Il va vous emmener votre fils en Alger, MOL. Scap. II, 11.
   Hélas ! mon pauvre maître.... on t'emmène esclave en Alger, MOL. ib..
   Irène se transporte en Épidaure, LA BRUY. XI.
   J'écrivis en Argos, RAC. Iphig. I, 1.
   Nous montons, leur dit-il, en Jérusalem, BOSSUET Serm. Quinq. 1.
   Ce grand Dieu n'avait de culte qu'en Jérusalem, BOSSUET Hist. II, 5.
Aujourd'hui on met à ; mais, en poésie, on pourrait très bien se servir de la tournure archaïque.
   Corneille a dit en Belle-Cour pour à la place BelleCour [à Lyon] : Je loge en Belle-Cour, environ au milieu, Dans un grand pavillon...., CORN. Suite du Ment. III, 3.
Godefroy, Lex. de Corneille, remarque qu'à Lyon on dit encore en Belle-Cour pour à la place Belle-Cour.
   5. Dans le même XVIIe siècle, on a employé d'une autre façon en pour à moderne.
   Et leur dit en leur nez qu'ils n'ont rien fait qui vaille, RÉGNIER Sat. IX..
   Elle mit en mon cou ses bras plus blancs que neige, RÉGNIER Élég. 4.
   Mettez-vous en ma place, MOL. le Dép. IV, 1.
   Si j'avais été en votre place...., MOL. Impromptu, 3.
   6. C'est encore en pour l'à moderne dans cet exemple-ci :
   J'ai vécu sans nul pensement, Me laissant aller doucement à la bonne loi naturelle ; Et je m'étonne fort pourquoi La mort osa songer à moi, Qui ne songeai jamais en elle, RÉGNIER Épitaphe faite par lui-même.
   .... De penser si souvent en vous, MÉRÉ Oeuvres posth. t. I, p. 94.
   1° EN, DANS. La différence essentielle que l'usage a mis entre ces deux mots, c'est que en ne se construit qu'exceptionnellement avec l'article défini le, la, les, tandis que dans exige ces articles dans sa construction. Cette condition fait que en donne aux mots une acception indéterminée que dans ne comporte pas.
   2° Je ferai cet ouvrage en deux jours, se dit par opposition à un temps plus ou moins long qu'on pourrait y employer. Je ferai cet ouvrage dans deux jours, se dit sans opposition, et seulement par rapport à l'espace de temps après lequel on commencera l'ouvrage.
   IXe s.
   D'ist di [de ce jour] in avant, Serment.
   Xe s.
   Qu'elle Deo raneiet [renie], chi maent [demeure] sus en ciel, Eulalie.
   In figure de colomb [elle] volat à ciel, ib..
   Postea en ceste causa ore potestis videre, Fragm. de Valenc. p. 469.
   En tot, ib..
   XIe s.
   De quel forfait que home out fait en cel tens...., Lois de Guill. 1.
   Set ans touz pleins ad ested en Espaigne, Ch. de Rol. I.
   Conquis [il] l'aura d'hoi cest jour en deus meis, ib. CXCIII.
   Ceste bataille seit jugée en son nom [de Dieu], ib. CCXXXVII.
   XIIe s.
   E [en] tes oreilles receif [reçois], sire, la meie ureison, Psautier de Corbie, dans RAYNOUARD, Gloss..
   En autre sens le songe [il] trestourna, Ronc. p. 198.
   An trestot vostre aez [âge], ib. p. 14.
   S'en ira Charles en France, ib. p. 27.
   En Saragoze [il] fait soner graille et cor, ib. p. 39.
   En dos lui vestent un haubert doplantin, ib. p. 50.
   En chief lui lacent un haume poitevin, ib. p. 50.
   L'uns [le va férir] en l'escu par delez le chantel, ib. p. 67.
   Onque nul jor [il] n'en joï en sa vie, ib. p. 127.
   Baron, dist Charles, traïez vous en ça, ib. p. 178.
   Bien [je] sai qu'en vous amer [je] n'ai droit, Couci, III.
   En amer gist hardemenz et paors [peur], ib. VII.
   La grant dolor que j'ai s'en chantant non [si ce n'est en chantant], ib. X.
   Ainz [je] sui touz tens en peine et en pourchas, ib. XI.
   Souvent [vous] me faites douloir En ce que trop [je] vous truis [trouve] lente, ib. XII.
   Toute leur peine [ils] ont mise en moi trahir, ib. XIII.
   Et la guerre dura tante mainte saison, Li uns rois après l'autre la repreist en son nom, Sax. III.
   XIIIe s.
   En tout cel an ne passerent dui mois qu'il n'assemblassent à Compiegne pour tenir parlement, VILLEH. VIII.
   En l'an après que cis preudoms ot commencé à parler de Dieu, ot un tournoi en Champaigne, VILLEH. II.
   Avoec cels alerent moult de sergens et de chevaliers dont li nom ne sont mis en escrit, VILLEH. XXXIII.
   Et erra tant qu'il vint e [en] le [la] cambre ù li rois gisoit, Aucassin, dans RAYNOUARD, Glossaire.
   Comment n'en quel maniere le lion [il] assailli, Berte, I.
   Qui l'ont de lieus en lieus çà et là conqueilli, ib. I.
   En larmes et en plors souvent le baiserai, ib. VII.
   En Dieu croire et amer [elle] ot si mise sa cure, ib. XLII.
   Et por ce qu'el fu esbahie, Commença à parler en bas, la Rose, 3577.
   Car por ce sunt en haut levés, Que l'en les puist après veoir De plus haut trebuchier et choir, ib. 6392.
   Amans n'aura jà ce qu'il quiert, Tous jors li faut, ja en paix n'iert [ne sera], ib. 2430.
   Et si te veil [je te veux] bien enseignier Que tu ne pues rien gaaignier En folie, ne en orgueil, ib. 1902.
   Le roy sailli en la mer, dont il fu en yaue jusques aus esseles, JOINV. 215.
   Se Diex morut en la croiz, aussi fist-il [St Louis], JOINV. 292.
   Se le roy ou les legaz vouloient envoier troiz cens chevaliers en Constantinoble, JOINV. 212.
   XVe s.
   Et quel conseil, dit la duchesse, vous faut-il avoir pour bien faire ? Ma femme, respondit le duc ; car sans elle je n'en ferai rien ; autant a-t-elle en mes enfants comme j'en ai, FROISS. II, II, 222.
   Et depuis en ça nous avons esté bien informez de la verité, FROISS. I, I, 53.
   Messire Thomas de Felleton, qui se tenoit en Bordeaux, FROISS. II, II, 4.
   Assez tost après ce qu'ils furent venus en Avignon, FROISS. I, I, 145.
   Lors entrerent en ces Flamands qui furent tous esbahis quand si près ils les virent d'eux, FROISS. I, I, 141.
   Je le puisse continuer [ce livre] et perseverer en telle maniere que tous ceux qui le liront...., FROISS. Prol..
   Si lui veuilliez prier en pitié, qu'il veuille avoir merci de nous, FROISS. I, I, 320.
   Aimery de Pavie qui en genoux et en grand cremeur avoit esté, FROISS. I, I, 326.
   Le roi de France et son conseil prennent grand plaisance en ce que vous sejourniez ci à grands frais, FROISS. I, I, 119.
   Ils jettent de cette claire paste sur cette chaude pierre, et en font un petit tourtel, en maniere d'une oublie, FROISS. I, I, 34.
   En l'assemblée des dessusditz, COMM. I, 1.
   Et mistrent le feu en une maison, COMM. IV, 3.
   Il faisoit mener sept ou huyt petis basteaux en intention de faire ung pont, COMM. I, 6.
   En peu de jours après fut desconfit en bataille et mort, COMM. I, 7.
   Qui voudroit bien regarder aux rigoureuses et soudaines punitions que Dieu a faites sur les grands princes, depuis trente ans en ça, on y trouveroit plus qu'en deux cens ans auparavant, COMM. VIII, 17.
   XVIe s.
   Il falloit avoir les reins ceints, des pieds en ses souliers et une main en son baston. - Il se reprit incontinent : " Eh bien ! dit-il, des souliers en ses pieds, et un baston en sa main, ", MARG. Nouv.. XI.
   Noyer en la mer, MONT. I, 4.
   En son dernier soupir, MONT. I, 5.
   Consoler sa mort en la mort d'un ennemy, MONT. ib..
   En la guerre que Ferdinand feit contre...., MONT. I, 8.
   En public, MONT. I, 11.
   Ceulx qui entreprennent, vivants et respirants, jouyr de l'ordre et honneur de leur sepulture, et qui se plaisent de veoir en marbre leur morte contenance, MONT. I, 18.
   Mettre en pièces, MONT. I, 27.
   En Sparte, MONT. I, 379.
   Croire en Dieu, MONT. I, 22.
   En tant qu'il est en nous, MONT. I, 78.
   Il alla jusqu'en Jerusalem pour...., MONT. I, 310.
   De pere en fils, MONT. II, 296.
   Porter en son doigt un anneau d'or, MONT. I, 337.
   Ils prennent armes en dos [ils endossent], MONT. II, 275.
   L'histoire a je ne sçay quoy de venerable, en ce qu'elle fait profession de dire tousjours verité, AMYOT Préf. IV, 28.
   Toutes ses statues presque ont l'armet en teste, AMYOT Péricl. 3.
   Estans en chemises tous desceints, AMYOT Lucull. 28.
   Mettre en nonchaloir, AMYOT ib. 30.
   Agesilaus fist response, que, quant à la paix, il n'estoit pas en luy de la faire, AMYOT Agésilas, 16.
   Demaratus se prit à plorer de joye, en bon vieillard comme il estoit, AMYOT Alex. 68.
   Je fremis toute et ne suis plus en moy !, RONS. 641.
   M. d'Estrozze [Strozzi] attitra un courrier pour venir en poste porter les nouvelles de la mort de Brusquet, et prioit le roi de vouloir donner et continuer sa poste à sa femme, en ce que [à condition que] elle espousast ce courrier qui estoit à lui, BRANT. t. I, p. 448, édit. MONTMERQUÉ..
   Picard, in ; wallon, in ; provenç. en ; espagn. en ; portug. em ; ital. in ; du latin in; allem. in. Le vieux français a dit quelquefois e pour en.
SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE
1. EN. - REM. Ajoutez :
   7. En rue, pour dans la rue. J. J. Rousseau écrit de Lyon :
   Je suis logé chez la veuve Petit, en rue Genti, J. J. ROUSS. Lett. à Mlle Serre, 1736.
   Chez M. Barcellon, huissier de la Bourse, en rue Basse, J. J. ROUSS. Lett. à Mme de Warens, 23 oct. 1737.
   8. Mme de Sévigné emploie en avec un nom de personne pour signifier : avec, chez.
   J'allais me promener à Vincennes, en famille et en Troche [avec Mme de la Troche], SÉV. 10 avril, 1671.
   J'ai été cette nuit aux Minimes ; je m'en vais en Bourdaloue, SÉV. 25 déc. 1671.
Ce sont des tournures plaisantes.
   9. Régnier a dit : Qui vit naître et mourir les Muses en la France, Sonnet I. En la France, moins usité que en France, est bon néanmoins.
   10. J. J. Rousseau a dit en Deux-Cents pour : dans le conseil des Deux-Cents, à Genève. Je ne doute pas que le discours tenu par le procureur général en Deux-Cents ne soit sincère, Lett. à d'Ivernois, 24 mars 1768.
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en 2.
(an ; l'n se lie quand en précède le verbe ; et alors en se prononce exactement comme la préposition en : je n'en ai pas, il s'en amuse ; le succès en est douteux, dites : je nan-n ai pas ; il san-n amuse ; le succès an-n est douteux ; quelques personnes prononcent : je na-n ai pas, il s'a-n amuse, le succès a-n est douteux ; mais cette prononciation, peut-être plus conforme à d'autres analogies, est aujourd'hui provinciale ; en ne se lie pas quand il suit le verbe : donnez-en un ou deux, dites donnezan un ou deux) pron.
   Pronom relatif de la 3e personne, des deux genres et des deux nombres, disent la plupart des grammairiens, pronom relatif ou particule relative, dit l'Académie ; d'après Jullien, nom général de choses qu'on qualifie ordinairement de pronom, parce qu'il se met, comme les pronoms, devant les verbes dont il est le complément et, après eux, à l'impératif ; mais il n'indique aucunement la 1re, la 2e ou la 3e personne ; il ne remplace pas toujours un nom, mais bien souvent une proposition tout entière ; il ne s'accorde pas du tout avec les noms qu'il représente ; il est toujours, au cas indirect, marqué par de, et ne joue jamais le rôle de sujet. Ce fait est que en, venant du latin inde qui signifie de là, est d'abord et étymologiquement un adverbe de lieu, puis exprime par extension toute sorte d'autres rapports.
   De ce lieu, de ces lieux. Vous allez à Lyon, j'en viens.
   Dans le sein paternel je me vis rappelée, Un malheur inouï m'en avait exilée, VOLT. Tancr. I, 4.
   D'adverbe de lieu, en passe au rôle de pronom (comme où, qui, du rôle d'adverbe de lieu, passe au rôle de pronom relatif dans : le bonheur où j'aspire), et signifie de ce, de ceci, de cela, de cette chose, de ces choses. Cette affaire est délicate, le succès en est douteux.
   [Elle] Se saisit du poignard et de sa propre main à nos yeux, comme lui, s'en traverse le sein, CORN. Oedipe, V, 10.
   Comme l'amour ici ne m'offre aucun plaisir, Je m'en veux faire au moins qui soient d'autre nature, MOL. Amph. III, 2.
   Non, en conscience, vous en [des fagots] payerez cela, MOL. Méd. m. lui, I, 6.
   Qu'avez-vous fait pour être gentilhomme ? croyez-vous qu'il suffise d'en porter le nom et les armes ?, MOL. Don Juan, IV, 6.
   Vous voudriez bien aussi savoir qui est la personne qui en écrit de la sorte [dans les deux premières provinciales], PASC. Rép. aux deux 1res lett..
   Votre père et les rois qui les ont devancés, Sitôt qu'ils y montaient [au trône], s'en sont vus renversés, RAC. Théb. IV, 5.
   Cet illustre trépas ne peut-il vous calmer, Puisque même mes fils s'en laissent désarmer ?, RAC. ib. III, 3.
   Nourri dans le sérail, j'en connais les détours, RAC. Bajaz. IV, 7.
   La vie est un dépôt confié par le ciel ; Oser en disposer, c'est être criminel, GRESS. Édouard III, IV, 7.
   Néron, bourreau de Rome, en était l'histrion, DELILLE l'Homme des champs, I.
   Hésiode a écrit sur l'agriculture ; Démocrite, Xénophon, Aristote, Théophraste en ont traité en prose, DELILLE Préf. aux Géorgiq..
   Il se dit aussi des personnes : de lui, d'elle, d'eux, d'elles.
   Sans l'avoir jamais vu, je connais son courage ; Qu'importe après cela quel en soit le visage ?, CORN. Suite du Ment. IV, 2.
   J'en ai fait un martyr [de Polyeucte], sa mort me fait chrétien ; J'ai fait tout son bonheur, il veut faire le mien, CORN. Poly. V, 5.
   C'est pourquoi, dépêchons, et cherche dans ta tête Les moyens les plus prompts d'en faire ma conquête, MOL. l'Étour. I, 2.
   Le plus parfait objet dont je serais charmé N'aurait pas mon amour, n'en étant point aimé, MOL. Dép. am. I, 3.
   Le bon de cette profession [médecin], c'est qu'il y a parmi les morts une honnêteté, une discrétion la plus grande du monde, et jamais on n'en voit se plaindre du médecin qui l'a tué, MOL. Méd. m. lui, III, 2.
   J'espère retrouver mes parents ; j'en attends des nouvelles avec impatience, MOL. l'Av. I, 1.
   Multipliez les créatures, et en augmentez les perfections de plus en plus jusqu'à l'infini, ce ne sera toujours, à les regarder en elles-mêmes, qu'un non-être, BOSSUET Concupisc. 12.
   La crainte de faire des ingrats ou le déplaisir d'en avoir trouvé, ne l'ont jamais empêchée de faire du bien, FLÉCH. Or. fun. de Mme de Montaus..
   Quoi, vous en [de lui] attendez quelque injure nouvelle ?, RAC. Andr. II, 1.
   Ses grâces, sa beauté, sa fière modestie, Tout m'en plaît, CRÉBILLON Catilina, I, 1.
   C'est sa tante ; pourquoi ne la verrait-il pas ? Il en doit recueillir un fort gros héritage, DESTOUCH. le Médis. II, 7.
   J'adore Adélaïde, et j'en suis estimé, PIRON G. Wasa, IV, 2.
   Au roi que nous pleurons, il laissa la couronne ; Constance en est la soeur...., SAURIN Blanche et Guisc. I, 4.
   Nos poëtes ont assez reposé leurs amants sur le bord des ruisseaux, j'en ai voulu asseoir sur le rivage de la mer, BERN. DE ST-P. Paul et Virginie..
   Par lui, par elle, par eux, par elles, en tant que, dans la phrase, le de qui est dans en peut être conçu comme remplacé par la préposition par.
   Tout est au-dessous d'elle, à moins que de régner ; Et sans doute qu'Aemon s'en verra dédaigner, CORN. Oed. I, 3.
   Sert à rappeler d'une manière plus ou moins régulière et précise l'idée énoncée dans une proposition.
   Consultez-en, seigneur, la reine votre mère, CORN. Nicom. I, 2.
   Allons en résoudre chez moi, CORN. Sertor. IV, 4.
   Et si la curiosité me prenait de savoir si ces propositions sont dans Jansénius, son livre n'est pas si rare ni si gros que je ne le puisse lire tout entier pour m'en éclaircir, sans en consulter la Sorbonne, PASC. Prov. 1.
   La mort qui frappe tôt s'en fait moins ressentir, ROTR. Bélis. V, 5.
   Mais je ne suis pas homme à gober le morceau, Et laisser le champ libre aux yeux d'un damoiseau ; J'en veux rompre le cours, MOL. Éc. des f. III, 1.
   Ah ! ah ! tu t'en avises, Traître, de t'approcher de nous, MOL. Amph. II, 3.
   Il connaît et son crime et son ingratitude, Il s'en hait, il en sent la peine la plus rude, TH. CORN. Ariane, III, 2.
   Le ciel, en le perdant, s'en est vengé sur vous, RAC. Théb. V, 3.
   En t'avouant pour fils en est-il moins coupable ? En es-tu moins Brutus ? en es-tu moins romain ?, VOLT. Mort de Cés. III, 2.
   Romains, j'aime la gloire et ne veux point m'en taire, VOLT. Rome sauvée, V, 2.
   Je t'en aime encor plus, et je crains davantage, VOLT. Mér. V, 4.
   Ma douleur s'en accroît, ma honte s'en augmente, VOLT. Tancr. III, 4.
   Il entre dans un grand nombre de gallicismes, comme ceux-ci par exemple : il en veut à un tel ; il s'en donne ; je m'en promets ; en venir aux mains ; il s'en faut.
   Il en est de.... c'est-à-dire la chose se comporte comme. Il en sera de cette réclamation comme de celle de l'an passé.
   Mais de vous, cher compère, il en est autrement, MOL. Éc. des f. I, 1.
Vaugelas condamnait cette locution, et voulait y supprimer en ; suivant lui il fallait dire : il est des hommes comme de.... et non il en est des hommes comme de.... On lui objectait que cette suppression faisait amphibologie, et que il est des hommes semblait d'abord signifier : il y a des hommes. Finalement en a triomphé, et à bon droit ; ce n'est pas la logique qui demandait ce pléonasme, mais la clarté du discours y a gagné.
   C'en est assez, c'est-à-dire cela suffit.
   En est-ce assez, ô ciel ?, CORN. Cinna, V, 3.
   C'en est trop, la chose dépasse la mesure.
   Mais, c'en est trop, Cléone, RAC. Andr. II, 1.
   En être, c'est-à-dire être d'un complot, d'un secret, d'une cabale, etc.
   Quoi ! Néarque en est donc [de la secte des chrétiens], CORN. Poly. III, 2.
   En être à, n'être pas plus avancé que....
   N'est-il pas singulier que, dans une ville aussi fameuse que Carthage, on en soit à chercher l'emplacement même de ses ports ?, CHATEAUBR. Itin. III, 185.
   En être pour, perdre. J'en suis pour mon argent.
   Où tout autre aurait trouvé du moins quelque honneur, j'en suis pour mon argent et ma réputation, P. L. COUR. I, 61.
   C'en est fait, la chose est terminée, résolue.
   Mes amis sont tous prêts, c'en est fait, il est mort, CORN. Héracl. IV, 6.
   En est-ce fait, Arcas ?, RAC. Mithr. V, 2.
   En tenir, être joué, trompé.
   Hé ! bien, monsieur, Nous en tenons tous deux, si l'autre est véritable, MOL. Dépit. am. I, 5.
   En donner d'une, tromper, abuser.
   Bon, bon, tu voudrais bien ici m'en donner d'une, MOL. Dép. am. III, 7.
   On dit aussi, en tenir, dans le sens d'être amoureux.
   En planter, faire porter des cornes à un mari.
   Je sais les tours rusés et les subtiles trames Dont, pour nous en planter, savent user les femmes, MOL. Éc. des f. I, 1.
N'en pouvoir mais, n'être pas cause de....
   ... Ayant de la manière Sur ce qui n'en peut mais déchargé sa colère, MOL. Éc. des f. IV, 6.
   N'en pas devoir, avoir autant qu'un autre la chose, la qualité dont il s'agit.
   Il ne vous en doit rien, madame, en dureté de coeur, MOL. Princ. d'Él. III, 5.
   En être jusqu'à, et, en supprimant jusque, en être à, être conduit au point de.
   Pour moi, j'en suis souvent jusqu'à verser des larmes, MOL. Psych. I, 1.
   S'en tenir à, n'aller pas plus loin que.
   Napoléon ajouta quelques menaces déjà moins violentes, et il s'en tint aux paroles, soit qu'il eût jeté toute sa colère dans un premier mouvement, soit qu'il n'eût voulu qu'en effrayer tous les Allemands qui seraient tentés de l'abandonner, SÉGUR Hist. de Nap. IX, 6.
   S'en dire, se faire à soi-même des reproches, des remontrances.
   Mon coeur s'en est plus dit que vous ne m'en direz, RAC. Brit. III, 1.
   En croire quelqu'un, ajouter foi à ses dires.
   Je ne vous en croirai qu'après l'expérience, CORN. Cid, II, 1.
À qui en a-t-il ? c'est-à-dire contre qui est-il en colère ?
   Je suis pétrifié, dit-il ; à qui en a-t-il ?, Mme DE GENLIS Veillées du chât. t. III, p. 136, dans POUGENS.
   En- sert aussi de préfixe pour indiquer déplacement : emporter, porter-en, portare inde, emmener, mener-en, minare inde, s'enfuir, fuir-en, fugere inde, s'en aller, aller-en, aller de là, etc.
   1. En se met toujours avant le verbe, et, si le verbe est composé, avant le verbe auxiliaire : il en parle, il en a parlé ; excepté à l'impératif (2e personne du singulier, 1re et 2e personnes du pluriel), où il se met après, s'y joignant par un trait d'union : prends-en, parlez-en, parlons-en.
   2. Avec les impératifs de la 1re conjugaison, à la 2e personne du singulier, on intercale pour l'euphonie une s, de cette façon : parles-en.
   3. Si le verbe à l'impératif est construit avec une négation, en se met avant le verbe : n'en parle pas ; ne vous en étonnez pas ; n'en disons rien ; ne nous en effrayons pas.
   4. En, construit avec des pronoms, se met toujours après ces pronoms : il vous en a parlé ; il s'en moque ; parlez-nous-en ; retirez-les-en ; nous vous en empêcherons ; nous ne vous en empêcherons pas ; il t'en enverra ; vous lui en adresserez.
   5. À l'impératif, quand en est joint avec moi, toi, on change moi, toi, en m', t' : va-t'en, donne-m'en, donne-t'en ; et, avec la négation : ne m'en veuille pas, ne t'en vante pas.
   6. En joint à y se met toujours après y : il s'y en donna.
   Il faut donc que, pour les ordures, vous ayez des lumières que les autres n'ont pas ; car, pour moi, je n'y en ai point vu [dans l'École des femmes]. - C'est que vous ne voulez pas y en avoir vu, assurément, MOL. Critique, sc. 3.
   J'y ai fait tant de corrections, j'y en ferai tant encore, VOLT. Lett. d'Argent. 18 avr. 1764.
De même à l'impératif : mettez-y en. Lachaussée a eu tort de dire dans l'École des mères, IV, 4 : je m'en y vais ; il faut : je m'y en vais.
   7. En joue toujours le rôle de complément indirect, puisqu'il contient virtuellement la préposition de : voyez ces fleurs ; en avez-vous cueilli ? c'est-à-dire : avez-vous cueilli une part de ces fleurs ? En conséquence, le participe passé qui le suit reste invariable, parce que en auquel il se rapporte n'a par lui-même ni genre ni nombre.
   Il a lui seul fait plus d'exploits que les autres en ont lu, BOILEAU Disc. à l'Acad..
   Baléazar est aimé des peuples ; en possédant les coeurs, il possède plus de trésors que son père n'en avait amassé par son avarice cruelle, FÉN. Tél. VIII.
   Idoménée a fait de grandes fautes, mais cherchez dans tous les pays les mieux policés un roi qui n'en ait pas fait d'inexcusables, FÉN. ib. XII.
   Par son analyse, Descartes fit faire plus de progrès à la géométrie qu'elle n'en avait fait depuis la création du monde, THOMAS Éloge de Desc..
   Cependant des grammairiens, prêtant à en un sens qu'il n'a pas, disent que le participe peut s'accorder ; c'est une erreur ; mais l'accord est une licence qu'on peut passer à un poëte, sans devoir pour cela faire autorité : Des pleurs, ah ! ma faiblesse en a trop répandus, VOLT. Oreste, II, 2.
Mais, dans ce vers de Racine :
   Et de ce peu de jours, si longtemps attendus, Ah ! malheureux, combien j'en ai déjà perdus !, RAC. Bérén. IV, 4.
il ne faudrait pas croire que c'est en qui détermine l'accord du participe ; c'est combien qui le détermine. Voy. COMBIEN, remarque 1 ; suivant la règle, on dira : combien de jours j'ai perdus, ou combien j'ai perdu de jours.
   8. Dans le XVIIe siècle, on employait volontiers en par pléonasme.
   Il y a, dans l'instruction, quelque chose qui ne dépend que de la conformation des organes, et de cela les animaux en sont capables comme nous, BOSSUET Connaiss. V, 5.
   Dans la milice sacrée, c'est en être déserteur que de cesser de combattre, MASS. Profess. rel. 2.
   Des restes de sa droiture, il en fait les ébauches de ses passions, MASS. Panég. St Thom..
Ce pléonasme n'est pas sans utilité, et pourrait, dans quelques cas, être imité.
   9. Les substantifs pris d'une façon partitive, sans article défini, en un sens général, ne peuvent guère être représentés consécutivement par les pronoms et en conséquence par en.
   Cependant cette phrase ne doit pas être condamnée : Pardonnez-moi si vous ne me trouvez que bon citoyen, et soyez sûr qu'il n'y en a point qui attende de vous de si grandes choses, VOLT. Corresp. génér. 18 déc. 1744.
   10. Avec faire on peut, dans s'en aller, supprimer le pronom personnel s' (voy. ALLER, S'EN ALLER).
   Il faut que ce soit elle avec une parole Qui trouve le moyen de les faire en aller, MOL. D. Garc. IV, 6.
   Vous ne voulez pas faire en aller cet homme-là, MOL. Imprompt. 2.
   11. Molière a dit : en être de même, pour être de même.
   Il [cela] est très naturel, et j'en suis bien de même, MOL. Dép. am. I, 3.
Cette tournure n'est plus usitée.
   12. Au XVIIe siècle, on se servait de en précédé de et pour joindre deux membres de phrase à peu près comme nous les joindrions par dont ; la tournure est commode, et mérite d'être regrettée.
   C'est un autre ennemi qu'il faut combattre, et en porter tout le poids et la violence, FOLARD Traité de la colonne, V.
   IXe s.
   Si io [je] returner non l'int pois [si je ne l'en puis détourner], Serment.
   Xe s.
   Ell' ent adunet [inde adonat, en abandonne] lo suon element, Eulalie.
   Et celes elemosynas ent posciomes [puissions] facere, que lui ent possumus proferre, Fragm. de Valenc. p. 469.
   XIe s.
   Puisque serment li est jugied, ne l'en [de son bétail] pot pas puis lever per le jugement de Engleterre, Lois de Guill. 25.
   Bien en [avec de l'argent] porrat louer ses soudoiers, Ch. de Rol. III.
   Terres et fiés [fiefs] tant com vous en voldrez, ib. v.
   Des Frans de France en i a plus de mil, ib. XII.
   Livrez m'en [de cette commission] ore le gant et le baston, ib. XVII.
   [Je] desfi les en, sire, vostre veiant [à vos yeux], ib. XXIV.
   En [pour servir son roi] doit on perdre et du cuir et du poil, ib. LXXVII.
   XIIe s.
   Quant Artus ot sa terre asise.... Genievre prist, s'in fist roïne, Rom. de Brut, t. II, p. 69.
   S'en [pour cela] devroie estre occis, Ronc. p. 24.
   Bien l'avez fait, mout [je] vous en doi amer, ib. p. 33.
   Garés en vous, gentils fils à baron, ib. p. 40.
   Des douze pers, li dis en sont ocis, ib. p. 63.
   S'or [je] ne le venge, mout m'en doit on blasmer, ib. p. 75.
   Là 'n est la joste de cent mille esgardée, ib. p. 144.
   Et quant mes cuers s'est mis en li [elle] amer, Je ne m'en puis mie ariere retraire, Couci, II.
   Onques vers li [elle] [je] n'oi [n'eus] faus cuer ne volage ; Si m'en devroit pour tant mieux avenir, ib. XIX.
   Il en reprist une autre [épouse] qui fu assez vaillans, Sax. v.
   XIIIe s.
   Nos avons paié nostre passage ; se il nos en vuellent mener, nous en irons volentiers, VILLEH. XXXVI.
   Celle dame mourut, l'ame en puist Diex garder, Berte, III.
   Alez ent, orde garce, ma dame veut dormir, ib. LXXXVII.
   Les autres [elle] end [de couteaux] a fait garnir, Lai d'Ignaurès.
   Et je qui onques ne li menti, li respondi que je en ameroie miex avoir fait trente pechés, que estre mesiaus [lépreux], JOINV. 194.
   XVe s.
   Et en furent accusés de cette double trahison messire Pierre de Landuras et messire Bertran du Franc, FROISS. II, II, 2.
   Et encore detint le dit brigand le dit chastel et le garnit bien, et en guerroya le pays, FROISS. I, I, 324.
   Ce que j'en ay faict, sire, ce n'a esté que d'aventure, dont y devez bien penser, Jehan de Saintré, ch. 42.
   XVIe s.
   Je vous prye, n'en parlez plus, et m'en laissez faire, RABEL. Pant. II, 18.
   Va-t-en à ton roy en son camp, et luy dis nouvelles de ce que tu as veu, RABEL. ib. II, 28.
   Baille icy, villain, baille, et en va querir d'aultres, RABEL. ib. II, 30.
   Cerchons donc par conjecture, si nous en pouvons trouver, comment s'est ainsi si avant enracinée ceste opiniastre volonté de servir, LA BOÉT. 25.
   Par adventure en y a il bien aussi quelques uns de ceste sorte, mais d'eux ne parle-je pas maintenant, ainçois d'autres que j'en voy, qui...., LA BOÉT. 125.
   Phyton respondit qu'ils en [à cause de cela] estoient d'un jour plus heureux que luy, MONT. I, 3.
   Aulcuns en prinrent argument que...., MONT. I, 7.
   Allez vous y en, MONT. I, 296.
   Prens t'en ailleurs, MONT. I, 22.
   Althacus ne s'en vouloit point aller, AMYOT Lucull. 29.
   Elle s'arracha d'alentour de la teste son bandeau royal, et, se le nouant à l'entour du col, s'en pendit, AMYOT ib. 32.
   Cela fut decouvert à Tigranes qui l'en feit mourir, AMYOT ib. 58.
   Il lui demanda de combien il en avoit affaire, et l'autre luy respondit qu'il en auroit assez de cent, AMYOT ib. 79.
   Il escrivit en terre : fuy t'en, Mithridates, AMYOT Démétr. 5.
   Berry, in, allons-nous in ; provenç. ent et ne ; ital. ne ; anc. ital. ende, ensuite ; du latin inde, de là, d'ici, en.

Dictionnaire de la Langue Française d'Émile Littré. . 1872-1877.

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