faire

faire
faire 1.
(fê-r) Au XVIe Siècle, d'après Bèze, les Parisiens prononçaient à tort fesant au lieu de faisant ; c'est cette prononciation des Parisiens, condamnée alors, qui a prévalu ; on prononce aujourd'hui fe-zan, fe-zon, fe-zê, fe-zié), je fais, tu fais, il fait, nous faisons, vous faites, ils font ; je faisais ; je fis ; je ferai ; je ferais ; fais, qu'il fasse, faisons, faites, qu'ils fassent ; que je fasse, que tu fasses, qu'il fasse, que nous fassions, que vous fassiez, qu'ils fassent ; que je fisse ; faisant ; fait, faite, v. a.
   Mot à signification très étendue qui, exprimant au sens actif ce que agir exprime au sens neutre, et au sens déterminé et appliqué à un objet ce que agir exprime au sens indéterminé et abstrait, dénote toute espèce d'opération qui donne être ou forme.
1°   Donner être ou forme.
2°   Engendrer.
3°   Façonner, fabriquer, construire, en parlant des oeuvres matérielles de l'art et de l'industrie.
4°   Se dit dans le même sens, en parlant des oeuvres de l'intelligence, de l'imagination.
5°   Il s'emploie dans un sens beaucoup plus étendu, en parlant de tout ce qu'un sujet opère, effectue, exécute dans l'ordre physique ou moral.
6°   Faire quelque chose pour quelqu'un, lui accorder ou lui faire obtenir quelque chose.
7°   Il se dit des choses qui sont agents de quelque chose.
8°   Se faire, faire à soi, se créer, se procurer.
9°   Faire d'une personne, d'une chose.... la changer en, en user comme de....
10°   Faire suivi de la préposition de, disposer de quelqu'un ou de quelque chose, en tirer parti d'une façon quelconque.
11°   Employer ses forces, son activité à quelque chose, s'en occuper, y passer son temps.
12°   Faire du mal, faire du bien à quelqu'un.
13°   Récolter ; semer, cultiver.
14°   Dans le commerce, faire le genre d'opérations auxquelles on se livre.
15°   Produire le même effet, le même résultat que....
16°   Arranger, mettre dans un état convenable.
17°   Mettre en pratique, observer, en parlant de choses d'obligation, de précepte.
18°   Former par un exercice convenable ; accoutumer, habituer.
19°   Se dit des choses qui marquent espace, étendue.
20°   Il exprime un grand nombre de modes d'action et de manières d'être, au moyen des autres mots de la phrase auxquels il est lié et qui lui donnent sa signification spéciale.
21°   Il se dit de certaines fonctions de guerre.
22°   Divers emplois, en termes de marine.
23°   À la natation, faire la planche.
24°   Divers emplois, en termes de vénerie.
25°   Divers emplois, en termes de jeux.
26°   Amasser, mettre ensemble.
27°   Faire des recrues, appeler des hommes sous les drapeaux.
28°   Acquérir, gagner.
29°   Consacrer un temps à l'étude d'une chose.
30°   Il se dit en parlant des différentes professions, métiers, emplois.
31°   Passer par, avoir pour maîtres, en parlant de domestiques.
32°   Faire une maladie, passer par une maladie, la subir.
33°   Il se dit de différentes occupations de la vie courante.
34°   Constituer quelqu'un en une certaine dignité ou titre.
35°   Donner à quelqu'un certaine qualité, condition.
36°   En termes de bourse, faire tant. En termes de finance et de jeu, faire bon.
37°   Il se dit des personnes qu'on se concilie, qu'on s'attache.
38°   Représenter un personnage.
39°   Prendre le caractère de jouer le rôle de.
40°   Causer, déterminer, procurer.
41°   Être ; constituer.
42°   Former un ensemble, un tout.
43°   Faire tout, avoir la suprême influence, être décisif.
44°   Représenter comme, en parlant de personnes ou de choses.
45°   Évaluer à un certain prix.
46°   Allouer, en parlant d'une somme
47°   En termes de grammaire, avoir une certaine désinence ou flexion.
48°   Rendre des excréments
49°   Chemin faisant.
50°   Faire suivi d'un adjectif pris adverbialement.
51°   Faire construit avec la particule en.
52°   Faire construit avec un infinitif
53°   Faire à savoir, faire connaître.
54°   Faire, verbe neutre. Opérer, travailler, se comporter
55°   Faire, avec un adverbe ou une locution adverbiale, se comporter comme l'indiquent l'adverbe ou la locution.
56°   Faire à quelqu'un, lui causer une certaine impression.
57°   Faire des armes, s'exercer à l'escrime.
58°   Faire, avoir une part dans le jeu, dans une affaire.
59°   Faire que, agir de manière que.
60°   Finir.
61°   Faire de, se comporter à l'égard de.
62°   Faire pour quelqu'un, le suppléer, tenir sa place, être son agent.
63°   Faire en, être négociant en.
64°   Faire pour, travailler pour ; faire pour, faire contre, être favorable à, contraire à.
65°   Avoir une influence, un effet quelconque.
66°   Dire, répliquer (fait-il, fit-il).
67°   Avoir fort à faire, avoir à faire, avoir beaucoup d'efforts à faire pour.
68°   C'est à faire à....
69°   Ne faire que, suivi d'un infinitif.
70°   Ne faire que de.
71°   Faire servant à remplacer un verbe qu'il faudrait répéter, et prenant alors la signification de ce verbe.
72°   Impersonnellement, faire sert à marquer l'état de l'atmosphère.
73°   Se faire, verbe réfléchi. Se constituer en un certain état.
74°   Se produire réciproquement.
75°   Être son propre instituteur.
76°   Se développer, en parlant des personnes.
77°   S'accoutumer, s'habituer.
78°   Se faire suivi d'un adjectif, devenir.
79°   Se faire suivi d'un infinitif, rend le verbe causatif en même temps que réfléchi.
80°   Se laisser faire, ne pas se défendre, ne pas opposer de résistance.
81°   Se faire, être fait.
82°   Impersonnellement, être, arriver.
   Donner l'être ou la forme. Dieu a fait l'homme à son image. Dieu a fait le monde en six jours.
   Vos mains m'ont fait et m'ont formé ; donnez-moi l'intelligence, afin que j'apprenne vos commandements, SACI Bible, Psaume CXVIII, 73.
   Ils pensent que pour eux le ciel fit l'Amérique, VOLT. Alz. IV, 3.
   Sur un modèle égal ayant fait les humains, VOLT. Scythes, IV, 1.
   Élevés ensemble, nés le même jour dans ce château, vous conviendrez qu'il semble que la destinée les ait faits l'un pour l'autre, GENLIS Théât. d'éduc. la Cloison, sc. 1.
   Tous les jours que Dieu fait, c'est-à-dire chaque jour.
   Par extension.
   Tithon n'a plus les ans qui le firent cigale, MALH. VI, 18.
   Fig.
   Homère a fait Virgile, dit-on ; si cela est, c'est sans doute son plus bel ouvrage, VOLT. Ess. poés. épiq. III.
   Engendrer. Faire un enfant, en parlant d'une femme, le mettre au monde. Et aussi en parlant de l'homme : Vous ferez un enfant, et vous voilà bien avancé !
   Faire un enfant à une femme, la rendre enceinte.
   Il [Frédéric] a fait plus de livres qu'aucun des princes contemporains n'a fait de bâtards, et il a remporté plus de victoires qu'il n'a fait de livres, VOLT. Lett. Prusse, 24 mars 1772.
   Faire des petits, en parlant des femelles des animaux, mettre bas.
   C'est une épagneule très petite, ajouta Zadig ; elle a fait depuis peu des chiens, VOLT. Zadig, 3.
   Lorsque la marte est prête à mettre bas, elle grimpe au nid de l'écureuil, l'en chasse, en élargit l'ouverture, s'en empare et y fait ses petits, BUFF. Quadrup. t. II, p. 245, dans POUGENS.
   Les feuilles du haricot à bouquets incarnats, plongées dans l'eau par leur pédicule, y ont fait des racines, mais seulement à l'extrémité inférieure de ce dernier, BONNET Usage des feuilles, 4e mém..
   Cet enfant fait ses dents, les dents lui viennent.
   On dit d'un malade chez qui se produisent pathologiquement de l'albumine, du sucre, du tubercule : il fait de l'albumine, du sucre, du tubercule.
   Façonner, fabriquer, construire, en parlant des oeuvres matérielles de l'art ou de l'industrie. Faire du pain, un habit, un tissu, une machine, une maison.
   ....Saluez ces pénates d'argile ; Jamais le ciel ne fut aux humains si facile Que quand Jupiter même était de simple bois ; Depuis qu'on l'a fait d'or, il est sourd à nos voix, LA FONT. Phil. et Bauc..
   Faire le vin, se dit de toutes les opérations qui forment la fabrication du vin.
   Faire le dîner, le déjeuner, préparer le dîner, le déjeuner.
   Faire à dîner, donner de quoi dîner. Faites-moi à dîner.
   Ne faire oeuvre de ses doigts, et, plus souvent de ses dix doigts, ne faire rien du tout, ne point travailler.
   Il se dit aussi des travaux des animaux. Les abeilles font le miel. L'oiseau fait son nid.
   Fig. Faire des brioches, voy. brioche.
   Les symphonistes de l'opéra, après Lulli, étaient si inhabiles et excitaient si bien les cris du parterre, qu'ils étaient taxés à six sols par faute qu'ils faisaient devant le public ; avec le total de ces amendes ils faisaient faire une immense brioche qu'ils mangeaient ensemble ; les condamnés à l'amende paraissaient à ce festin avec une petite brioche en carton à la boutonnière ; on les nomma croque-brioche, faiseurs de brioches ; et, par abréviation, brioche devint synonyme de faute, d'ânerie, CASTIL-BLAZE Hist. de l'acad. de musique, t. II, ch. 2, p. 68.
   Se dit dans le même sens, en parlant des oeuvres de l'intelligence, de l'imagination Faire un projet, un plan. Faire un poëme, un conte, des vers.
   Il y a un vieux évêque d'Évreux, qui a plus de quatre-vingts ans ; c'était autrefois l'évêque du Puy ; il a fait la vie de ma grand'mère, SÉV. 406.
   Et toujours mécontent de ce qu'il vient de faire, Il plaît à tout le monde et ne saurait se plaire, BOILEAU Sat. II.
   Faisant le même calcul sur le quatrième satellite de Jupiter, que nous avons supposé grand comme la terre, nous verrons qu'il aurait dû se consolider jusqu'au centre en 2905 ans, BUFF. Théorie de la terre, part. hypoth. Oeuvres, t. IX, p. 181, dans POUGENS..
   Terme de peinture. Peindre. Faire l'histoire. Faire les animaux. Ce peintre ne fait que le paysage. Faire sec et dur, peindre sèchement et durement.
   Pigal, qu'on appelait à Rome le mulet de la sculpture, à force de faire, a su faire la nature, la faire vraie, chaude et vigoureuse, DIDER. Sal. de 1765, Oeuvres, t. XIII, p. 331.
   Il s'emploie dans un sens beaucoup plus étendu, en parlant de tout ce qu'un sujet opère, effectue, exécute dans l'ordre physique ou dans l'ordre moral.
   Ne fais point d'autre crime, et j'atteste les dieux Qu'au lieu de t'en haïr, je t'en aimerai mieux, CORN. Hor. II, 5.
   Il veut publiquement Du prince Héraclius faire le châtiment, CORN. Héracl. IV, 6.
   Tu feras après ta harangue, LA FONT. Fabl. I, 19.
   Tu vois, Toinette, les desseins violents que l'on fait sur lui [sur mon coeur], MOL. Mal. imag. I, 10.
   Nous avions bu de je ne sais quel vin Qui m'a fait oublier tout ce que j'ai pu faire, MOL. Amph. II, 3.
   Ne voulez-vous point, un de ces jours, venir voir avec elle le ballet et la comédie que l'on fait chez le roi ?, MOL. B. gent. III, 5.
   Tu crains pour moi les maux que j'ai voulu me faire, Et tu ne trembles point de ceux que tu me fais, TH. CORN. Ariane, III, 4.
   Lamech, sorti de Caïn, avait fait le second meurtre, et on peut croire qu'il s'en fit d'autres après ces damnables exemples, BOSSUET Hist. II, 1.
   La mémoire de Joseph et des merveilles que Dieu avait faites par ce grand ministre des rois d'Égypte était encore récente, BOSSUET ib. II, 3.
   J'ignore de quel crime on a pu me noircir, De tous ceux que j'ai faits je vais vous éclaircir, RAC. Brit. IV, 2.
   Ce que j'ai fait, Abner, j'ai cru le devoir faire, RAC. Athal. II, 5.
   On accumule ces richesses qui sont le fruit des péchés qu'on a déjà faits, et les moyens de ceux qu'on veut faire, FLÉCH. I, 140.
   Vous semblez approuver mes feux ; Mais vous ne faites rien de tout ce qu'il faut faire Pour rendre mon amour heureux, CHAUL. à la marquise D. L..
   Elle leur fait [à ses fils] une destinée au gré de ses souhaits, sans consulter si les conseils éternels s'ajustent avec la témérité de ses espérances, MASS. Carême, Vocation..
   Sous ces fleurs trompeuses je trouvais à chaque pas le serpent qui faisait sur moi des morsures cruelles, MASS. Paraphr. Ps. XXII.
   Je ne me souviens plus quel était l'honnête homme qui priait Dieu tous les matins que ses ennemis fissent des sottises, VOLT. Lett. d'Alembert, 25 mars 1765.
   En général, les animaux peuvent apprendre à faire mille fois tout ce qu'ils ont fait une fois, à faire de suite ce qu'ils ne faisaient que par intervalles, à faire pendant longtemps ce qu'ils ne faisaient que pendant un instant, à faire volontiers ce qu'ils ne faisaient d'abord que par force, à faire par habitude ce qu'ils ont fait une fois par hasard, à faire d'eux-mêmes ce qu'ils voient faire aux autres, BUFFON Disc. nat. anim. Oeuvres, t. v, p. 360, dans POUGENS..
   Faire que sage, c'est-à-dire faire la chose que ferait une personne sage, voy. que.
   Faire quelque chose pour quelqu'un, lui accorder ou lui faire obtenir quelque chose. Il n'a rien voulu faire pour sa famille.
   C'est là [à la cour] que l'on sait parfaitement ne faire rien ou faire très peu de chose pour ceux que l'on estime beaucoup, LA BRUY. VIII.
   On dit de même : la nature a tout fait pour lui, c'est-à-dire il est doué de très heureuses dispositions.
   Il se dit des choses qui sont agents de quelque chose. La mine fit explosion. La grêle a fait du dégât.
   Ce qui fit vos grandeurs fera votre ruine, M. J. CHÉN. Oedipe roi, II, 2.
   Opérer. Les planètes font leur révolution autour du soleil en un temps déterminé.
   Se faire, faire à soi, se créer, se procurer.
   C'en est peut-être assez [de fermeté] pour une âme commune Qui du moindre péril se fait une infortune, CORN. Hor. I, 1.
   Je me fais des vertus dignes d'une Romaine, CORN. Cinna, III, 4.
   Et de cette union de tendresse suivie Se faire les douceurs d'une innocente vie, MOL. Femm. sav. I, 1.
   Une fille.... Qui, dans l'obscurité nourrissant sa douleur, S'est fait une vertu conforme à son malheur, RAC. Brit. II, 3.
   Aux champs Apuliens se faire une patrie, VOLT. Tancr. I, 1.
   On se fait des idées vagues et des préjugés sur tout, VOLT. Louis XIV, ch. 25.
   Je me suis fait enfin dans ces grossiers climats Un esprit et des moeurs que je n'espérais pas, VOLT. Scythes, II, 1.
   Il proscrit le sénat, et s'y fait des amis, VOLT. Rome sauv. IV, 4.
   Se faire fête d'une chose, s'en réjouir.
   Se faire honneur ou gloire de quelque chose, s'en tenir honoré, glorieux.
   Faire d'une personne, d'une chose.... la changer en, en user comme de...
   Que de tous tes sujets il fasse des rebelles, CORN. Perthar. III, 3.
   Et d'Indou qu'il était on vous le fait Lapon, LA FONT. Fab. VII, 6.
   Il [le loup] s'habille en berger, endosse un hoqueton, Fait sa houlette d'un bâton, LA FONT. ib. III, 3.
   Aussi les missionnaires eurent-ils la sagesse de civiliser, jusqu'à un certain point, les sauvages, avant de penser à les convertir ; ils n'essayèrent d'en faire des chrétiens, qu'après en avoir fait des hommes, RAYNAL Hist. phil. VIII, 14.
   Fig. Faire d'une mouche un éléphant, exagérer excessivement une petite chose.
   Faire de quelque chose une obligation, un devoir, etc. l'imposer comme une obligation, un devoir. Et avec le pronom personnel, se faire un devoir, une obligation d'une chose, la considérer comme de devoir, comme d'obligation.
   Faire un mérite à quelqu'un de quelque chose, lui tenir cette chose à mérite. Et, avec le pronom personnel, se faire un mérite d'une chose, la considérer comme un mérite pour soi.
   Faire gloire, faire vanité de quelque chose, en tirer gloire, vanité.
   Faire ses délices de quelque chose, y prendre un plaisir extrême.
10°   Faire suivi de la préposition de, signifie disposer de quelqu'un ou de quelque chose, en tirer parti d'une façon quelconque.
   Que voulez-vous que je fasse de cet homme-là ? Nous avons besoin d'argent, il n'en sait que faire, HAMILT. Gramm. 3.
   Que ferez-vous de cette chose, de cette personne, c'est-à-dire à quoi vous servira-t-elle ? Que ferait-il de moi ? que ferais-je de lui ?, BOURSAULT Ésope à la cour, IV, 1.
   Qu'avez-vous fait de cette personne, de cette chose ? c'est-à-dire comment en avez-vous disposé ? qu'est-elle devenue ? Français, qu'avez-vous fait du héros que j'adore ?, VOLT. Adél. du Guesclin. I, 2.
   Faire ce qu'on veut de quelqu'un, se dit d'une personne facile ou faible qui s'accommode à ce qu'on veut d'elle.
   À nul fâcheux débat jamais vous ne viendrez, Et vous ferez de lui tout ce que vous voudrez, MOL. Tart. II, 2.
   Faites-en des choux, des raves, c'est-à-dire faites-en ce que vous voudrez.
   N'avoir que faire de, n'avoir pas besoin de (grammaticalement, la locution équivaut à : n'avoir chose que l'on puisse faire de....).
   Qu'a-t-on que faire de l'agriculture ? où l'on donne le bien pour rien, à quoi bon travailler pour l'acquérir ?, BALZ. Des gens savants..
   Veux-tu le réserver [le bien] Pour un âge et des temps qui n'en ont plus que faire ?, LA FONT. Fabl. X, 5.
   Ma foi, je crois que je n'ai que faire d'aller au magicien, et voici qui me montre tout ce que je puis demander, MOL. Mar. forcé, 11.
   Je sais bien que Votre Majesté n'a que faire de toutes nos dédicaces, MOL. Préc. rid. Épître dédic..
   Il dit fort posément ce dont on n'a que faire, RAC. Plaid. III, 3.
   N'avoir que faire à quelqu'un, n'avoir rien à faire auprès de lui.
   Je n'ai point été le voir parce que je n'ai que faire à lui, HAMILT. Gramm. 4.
   On n'a que faire, il est inutile.
   On n'a que faire d'avoir peur de trop charger la complaisance, MOL. l'Av. I, 1.
   Vous n'avez que faire de vous reprocher vos vérités, BERN. DE ST-P. Mort de Socr..
   N'avoir que faire, être inutile.
   Vous êtes un sot de venir vous fourrer où vous n'avez que faire, MOL. Méd. m. l. I, 2.
   Un gouverneur n'a que faire ici, SÉV. 489.
   N'avoir que faire de quelqu'un ou de quelque chose, n'en faire nul cas. Je n'ai que faire de lui et de ses visites.
   N'avoir que faire, signifie aussi qu'on désapprouve, qu'on trouve mauvais. Je n'ai que faire de vos discours.
   Je n'ai que faire ni d'air ni de chanson, MOL. Précieuses, 5.
   Tu n'as que faire de railler, MOL. Impr. 3.
   Nous n'avons que faire de leurs démêlés, PASC. Prov. 3.
11°   Employer ses forces, son activité à quelque chose, s'en occuper, y passer son temps. Faire un travail. Faire sa besogne. Il n'a rien fait de toute la journée.
   Que fait-il tout le long du jour ? Le ciel me sera témoin que j'ai fait pour toi tout ce que j'ai pu, MOL. Fourb. de Scap. II, 11.
   Hé ! bonjour, ma chère Lisette ; comment te portes-tu, mon enfant ? que fait ta belle maîtresse ?, REGNARD Retour impr. sc. 3.
   Ne rien faire, ne faire rien, vivre dans l'oisiveté.
   Vous n'êtes pas homme à vous embarrasser de ce que disent les dames de salon avec un nombre de fainéants, lâches envieux qui ne veulent rien faire et qui sont fâchés que les autres fassent, MAINTENON Lett. au duc de Noailles, 13 fév. 1711.
   Parce que la noblesse ne faisait rien, on a cru qu'il n'y avait rien de si noble que de ne rien faire, RAYNAL Hist. phil. VIII, 33.
   Ne faire rien, se dit d'un écolier qui ne travaille pas, ne s'applique pas. Un jeune homme qui ne fait rien.
   N'avoir rien à faire, plus rien à faire, n'avoir pas ou plus d'occupation.
   C'est une personne à tout faire, qu'on peut employer ou qu'on emploie à tout dans une maison ; en mauvaise part, c'est une personne dangereuse, capable d'actions mauvaises ou violentes.
   Je ne puis, je ne sais que faire à cela, c'est une chose où je ne puis rien.
   Que voulez-vous que j'y fasse ? c'est-à-dire, je n'y puis rien, cela ne dépend pas de moi.
   C'est un faire le faut, voyez FAIRE LE FAUT, à son rang.
   Je n'en ferai rien, je me garderai bien de faire ce dont il est question. Vous voulez que je parte ; je n'en ferai rien.
   Non, je n'en veux rien faire ; et, dans cette occurrence, Tout ce que vous croirez m'est de peu d'importance, MOL. Mis. IV, 3.
   On dit dans le même sens et dans le langage familier : non ferai.
   Je proteste de ne prétendre rien à tous vos biens, pourvu que vous me laissiez celui que j'ai. - Non ferai, de par tous les diables, MOL. l'Av. V, 3.
Faire du mal à quelqu'un, lui causer une souffrance physique ou morale. Oiseleur, laisse-moi, dit-il [l'autour] en son langage ; Je ne t'ai jamais fait de mal.
   L'oiseleur repartit : Ce petit animal T'en avait-il fait davantage ?, LA FONT. Fab. VI, 15.
   Je lui fais plus de mal que tous les autres, SÉV. 230.
   Faire quelque chose à quelqu'un, l'offenser, lui faire du mal.
   Ils ne seront pas plus ravis que de voir pendre un Limosin. - Qu'est-ce que les Limosins leur ont donc fait ?, MOL. Pourc. III, 2.
   Cela est bien horrible d'être accusée par un mari, lorsqu'on ne lui fait rien qui ne soit à faire, MOL. G. Dandin, I, 6.
   Moi qui jamais n'ai rien fait à personne, Il semble qu'aujourd'hui tout le monde m'en veut, IMBERT Jaloux sans amour, IV, 11.
Faire du bien à quelqu'un, se dit d'une personne qui donne des secours à quelqu'un dans la gêne ; se dit aussi d'une chose qui procure du bien-être. Cette potion lui fit du bien.
   Elliptiquement, grand bien vous fasse, se dit quand, refusant de faire une chose qui est proposée, on souhaite poliment que la chose fasse bien à celui qui la propose.
   Serviteur, et grand bien te fasse, Dit le hibou, pour moi, je veux guérir, LAMOTTE Fables, V, 1.
13°   Terme d'agriculture. Récolter. Les cultivateurs ont fait beaucoup de légumes cette année. On fera beaucoup de vin en Bourgogne.
   Faire les foins.
   Fig. Faire ses orges, voy. orge.
   Il signifie aussi semer, cultiver, sans impliquer l'idée de récolte. J'avais fait du blé d'hiver, il n'a pas réussi.
14°   Dans le commerce, faire signifie le genre d'opérations auxquels on se livre. Ce jardinier fait les primeurs. Ce négociant fait les eaux-de-vie.
15°   Produire le même effet, le même résultat que.... Le fusil était chargé avec du petit plomb ; mais, tiré de près, le coup fit balle.
   Les doigts, qui ont deux lignes de largeur, sont à peu près égaux en grosseur, mais le premier doigt, qui fait pouce, et qui a de longueur douze lignes, a un ongle de trois pouces six lignes qui est large et plat comme ceux des makis, BUFF. Quadrup. t. XIII, p. 74, dans POUGENS.
   Terme de vétérinaire. Faire les forces, faire ciseaux, se dit d'un cheval qui remue sans cesse sa mâchoire. Faire grenier ou magasin, se dit lorsque des pelotes d'aliments restent entre les joues et les molaires du cheval. Faire la révérence, broncher.
16°   Arranger, mettre dans un état convenable. Faire une chambre. Faire un lit. Faire un appartement. Faire les habits.
   Un grand benêt de vingt-cinq ou vingt-six ans, qu'elle avait pris pour faire le jardin, SÉV. 143.
   Au noble hôtel de la Vermine, On est logé très proprement ; Rivarol y fait la cuisine, Et Champcenets l'appartement, BEAUMARCH. Épigr..
   Faire la barbe, raser.
   Terme de boucherie. Faire une bête, la tuer et la préparer comme il faut.
   Fig. Faire le bec à quelqu'un, voy. bec.
   Familièrement. Faire maison nette, congédier tous ses domestiques.
   Faire table rase, voy. table.
17°   Mettre en pratique, observer, en parlant de choses d'obligation, de précepte. Faire ce que Dieu ordonne.
   Faites votre devoir, et laissez faire aux dieux, CORN. Hor. II, 8.
   Si les sages mortels à qui je dois la vie N'avaient fait à mon coeur un contraire devoir, VOLT. Orph. IV, 4.
   Terme de jurisprudence. Obligation de faire, obligation d'accomplir une action. Obligation de ne pas faire, obligation de s'abstenir d'une action.
   Se conformer à une prescription, à une obligation temporaire. Faire diète. Faire gras. Faire la quarantaine, ou faire quarantaine.
   Ce sont les riches qui n'ont pas la force de faire carême ; les pauvres jeûnent toute l'année, VOLT. Dict. phil. Carême..
   Fig. Faire son devoir, se dit de choses employées avec une grande force à faire quelque chose.
   Qu'il n'est griffe ni dent en la bête irritée Qui de la mettre en sang ne fasse son devoir, LA FONT. Fabl. II, 9.
   Faire une fête, la célébrer. Faire les Rois. Faire la Cène.
   Je m'en vais après dîner à Brévanes faire la Saint-Martin, SÉV. 479.
   Populairement. Faire le lundi, passer la journée du lundi à s'amuser au lieu de travailler.
   Faire le sabbat, voy. sabbat.
18°   Former par un exercice convenable. Ce général a fait de bons officiers.
   Tandis que, pour faire des soldats, il obligeait les hommes à une vie si laborieuse et si tempérante, BOSSUET Hist. I, 6.
   Faire la main, donner de l'habileté à la main. Cela fait la main.
   Se faire la main, devenir habile de la main.
   Terme de fauconnerie. Faire l'oiseau, le dresser.
   Accoutumer, habituer. Les voyages l'ont fait à la fatigue.
   Voiture qui, si galamment, Avait fait je ne sais comment Les muses à son badinage, SARRASIN Pompe funèbre de Voiture..
19°   Se dit des choses qui marquent espace, étendue. Faire des pas. Faire une promenade. Faire un tour de jardin. Un homme qui fait deux lieues par heure. Faire du chemin.
   Voyage qui ne peut pas être moins de trois cents lieues ; et autant tout au moins pour les autres détours en différents endroits ; il se trouvera qu'Alexandre, dans l'espace de moins de huit ans, aura fait avec son armée dix-sept cents lieues, sans parler de son retour à Babylone, ROLLIN Hist. anc. Oeuvres t. VI, p. 189, dans POUGENS.
   M. Fabry, qui avait erré pendant quinze mois dans les terres de l'Ouest, au delà du fleuve Mississipi, m'a assuré qu'il avait fait souvent trois et quatre cents lieues sans rencontrer un seul homme, BUFF. Quadrup. t. III, p. 221, dans POUGENS.
   Fig. Faire son chemin, obtenir de l'avancement, s'enrichir.
   On dit dans le même sens, il a bien fait du chemin en peu de temps.
   Faire des progrès, voy. progrès.
20°   Il exprime un grand nombre de modes d'action et de manières d'être, au moyen des autres mots de la phrase auxquels il est lié et qui lui donnent sa signification spéciale. En voici quelques exemples.
   Faire l'admiration, être admiré.
   Quoique jeune encore, il faisait l'admiration de tous ceux qui le connaissaient, ROLLIN Hist. anc. Oeuvres, t. x, p. 421.
   Faire des affaires, de mauvaises affaires à quelqu'un, lui susciter des embarras, des querelles, des périls.
   Les mauvaises affaires que M. d'Aubigné s'était faites l'obligèrent à la fin de prendre un établissement à l'Amérique, Mme DE CAYLUS Souvenirs, p. 11, dans POUGENS.
   Faire de mauvaises affaires, se ruiner, faire faillite.
   Faire besoin, être nécessaire.
   Quand nous faisons besoin, nous autres misérables, Nous sommes les chéris et les incomparables, MOL. l'Ét. I, 2.
   Faire un faux bond, commettre une faute.
   Mais s'il faut qu'à l'honneur elle fasse un faux bond, MOL. Éc. des f. III, 2.
   Faire comparaison, comparer.
   Voyez ces animaux, faites comparaison De leurs beautés avec les vôtres, LA FONT. Fabl. I, 7.
   Cette muraille fait le coude, elle forme un coude, un angle.
   Faire le coup de fusil, échanger des coups de fusil avec une troupe armée.
   Faire des discours, tenir des propos, un langage.
   Tous ces signes sont vains ; quels discours as-tu faits ?, MOL. l'Ét. III, 4.
   Sa maison fait face à la mienne, elle est en face de la mienne.
   Ce tableau fait pendant à tel autre, il sert ou peut servir de pendant à tel autre.
   Faire bonne mine, bon visage à quelqu'un, voy. mine et visage.
   Faire règle, loi, jurisprudence, c'est-à-dire être tenu pour règle, loi, jurisprudence. Ce texte fait règle. Cet exemple fait loi. Cet arrêt fait jurisprudence.
   Faire des siennes, faire des fredaines.
   On dit faire des leurs, quand il s'agit de plusieurs personnes.
   Causant, riant, faisant des leurs, Les amours suivent sur deux lignes, BÉRANG. Mon enterr..
   Faire les yeux doux, voy. oeil.
   Ne faire ni une ni deux, voy. deux.
21°   Il se dit de certaines fonctions de guerre. Faire sentinelle, faire faction, faire la garde, faire le guet, faire la ronde, faire la revue d'une armée.
22°   Terme de marine. Faire de l'eau, faire sa provision d'eau.
   Faire eau, se dit en parlant d'un vaisseau qui a une fente par où l'eau s'introduit.
   Faire les vivres, réunir les vivres nécessaires. Faire du bois, faire la provision de bois pour le bâtiment.
   Faire le quart, faire bon quart, veiller pendant le quart.
   Faire abordage, donner contre un vaisseau par accident.
   Faire la contre-marche, faire passer le vaisseau derrière la flotte pour revirer ou changer de bord.
   Faire pavillon, déployer le pavillon.
   Faire des feux, indiquer par des fanaux le danger où l'on se trouve.
   Faire honneur à une roche, s'en éloigner.
   Faire porter, arriver pour avoir plus de vent dans les voiles.
   Faire servir, déployer les voiles, mettre le navire en route.
   Faire tête, présenter le cap au vent ou au courant.
   Faire vent arrière, prendre le vent en poupe.
   Faire le nord, faire le sud, naviguer vers le nord, vers le sud.
   Faire des bordées ou une bordée, synonyme de courir des bordées.
   Flacourt toucha en faisant sa bordée trop près du Diamant, Mém. de VILLETTE, 1686, dans JAL.
   Faire sa cale, arranger dans la cale de son navire tout ce qui doit y trouver place.
   Dans les galères, faire armes en couverte, c'était faire ce qu'on nomme aujourd'hui le branle-bas de combat.
   Anciennement. Faire cap à la flotte, prendre la tête de la flotte, marcher le premier dans une réunion de navires, pour indiquer la route à tous les bâtiments. Faire cap à la mer, tourner l'avant du navire du côté du large.
23°   Terme de natation. Faire la planche, se soutenir sur le dos dans l'eau.
24°   Terme de vénerie. Faire sa tête, se dit du cerf dont le bois pousse depuis le mois de mars jusqu'au mois d'août.
   Faire sa nuit, se dit du cerf qui sort des demeures à la fin du jour, et va aux gagnages, où il reste jusqu'au lendemain matin.
   Faire tête aux chiens, les attendre, se défendre, surtout en parlant du sanglier et du loup.
25°   Terme de jeux. Faire les cartes, les battre avant de les distribuer.
   Absolument. À qui est-ce à faire ?
   Faire une levée, prendre les cartes qui sont jouées pour un coup.Faire la main, faire sa main, c'est-à-dire faire le plus grand nombre de levées.
   Faire le jeu, mettre au jeu. Le jeu est-il fait ?
   Faire tant de points, gagner tant de points.
   Faire la partie de quelqu'un, jouer avec lui.
   Faire le whist, le boston de quelqu'un, jouer habituellement avec lui le whist, le boston.
   Après avoir fait le whist de la marquise, PICARD Trois quartiers, I, 2.
   Absolument, faire le whist, le piquet, faire la partie de whist, de piquet.
   Au billard, faire signifie faire entrer une bille dans la blouse. Faire quelqu'un, faire sa bille. Faire une bille au doublé. Faire un carambolage, caramboler.
   Au trictrac, faire une case, un jan. Faire école, oublier de marquer les points que le coup de dé donne. Faire école de partie, oublier de marquer un trou.
   À la quintaine, faire une tête, enlever la tête avec la lance.
   Ils disputèrent le prix en une seule course, dans laquelle ils firent chacun quatre têtes, DANGEAU I, 131, 4 mars 1685.
26°   Amasser, mettre ensemble, en parlant d'argent ou de choses dont on a besoin. Voilà tout l'argent qu'il a pu faire. Faire des provisions, faire ses provisions. Faire une somme.
   Faire de l'argent, s'en procurer. Il avait des tableaux et des curiosités ; il en a fait quelque argent.
27°   Faire des recrues, appeler des hommes sous les drapeaux.
   On a dit dans le même sens, mais on ne le dit plus guère, faire des hommes, faire des troupes, faire des régiments.
   Alexandre voulut faire ces nouvelles troupes pour contre-carrer les vieilles et réprimer leur licence, VAUGEL. Q. C. 554.
   Lavardin et Amilly faisaient des troupes pour le roi dans le pays du Maine, RETZ II, 316.
   On dit aussi faire la maison d'un prince, d'un grand seigneur.
28°   Acquérir, gagner. Il a fait de très beaux bénéfices. Cet entrepreneur fait à peine ses frais.
   Je suis bien aise que saint Candide fasse des miracles ; mais je ne me soucie pas que ses miracles fassent de l'argent, MAINTENON Lett. à Mme de Brinon, 22 août 1683.
   On dit dans un sens analogue, faire une bonne maison.
   Faire fortune, gagner beaucoup d'argent.
   Il fit une assez grande fortune qu'il n'eût pas faite s'il n'eût été qu'homme de lettres, VOLT. Louis XIV, Écrivains, Valincour..
   Faire sa fortune, gagner puissance, dignité, gloire, crédit, renom.
   Il y avait entre Henri et Louis cette différence qui se trouve si souvent entre un gentilhomme qui a sa fortune à faire, et un autre qui est né avec une fortune faite, VOLT. Fragm. sur l'hist. art. 18.
   Faire sa fortune, signifie aussi devenir riche.
29°   Consacrer un temps à l'étude d'une chose. Faire ses humanités, son apprentissage.
   Faire son temps, accomplir les années de son service. Ce soldat a fait son temps, il est libéré.
   Faire son temps, se dit aussi d'un forçat condamné pour un temps.
   Par extension. Ce vieillard a fait son temps, il a vécu longtemps.
   Cela a fait son temps, cela n'est plus de mise, n'a plus d'influence. Ces idées ont fait leur temps.
30°   Il se dit en parlant des différentes professions, métiers, emplois qu'on exerce. Faire les fonctions de maître des cérémonies. Faire la médecine, le commerce, la banque. Il ne sait pas faire son métier.
   Fig. Faire métier et marchandise, trafiquer malhonnêtement.
   Ces gens qui, par une âme à l'intérêt soumise, Font de dévotion métier et marchandise, MOL. Tart. I, 6.
   Dans l'Église catholique, faire le diacre, le sous-diacre, faire les fonctions de diacre, de sous-diacre.
31°   Passer par, avoir pour maîtres, en parlant de domestiques. Ce domestique a fait plusieurs maîtres. Cette femme de chambre n'est pas habile ; elle fera plusieurs maisons.
32°   Faire une maladie, passer par une maladie, la subir.
   Elle a fait une maladie de langueur, et s'est vue réduite à la dernière misère, GENLIS Théât. d'éduc. la March. de mod. sc. 5.
33°   Il se dit de différentes occupations de la vie courante. Faire de l'exercice. Faire des visites. Faire une promenade.
   Faire un bon dîner, un mauvais dîner, avoir à son dîner des mets bons, mauvais.
   J'espère que, cet hiver, vous voudrez bien faire chez moi de ces petits dîners dont je prétends tirer tant d'avantages, RAC. Lett. à Boileau, 6 oct. 1692.
34°   Constituer quelqu'un en une certaine dignité ou titre.
   Il a perdu d'honneur Celui que de mon fils j'ai fait le gouverneur, CORN. Cid, II, 7.
   Ne vous hasardez point à faire un empereur, CORN. Othon, II, 5.
   Je puis faire les rois, je puis les déposer, RAC. Bérén. III, 1.
   Les évêques du temps des Carlovingiens faisaient et défaisaient les rois, VOLT. Moeurs, 27.
   J'ai fait des souverains et n'ai pas voulu l'être, VOLT. Oed. II, 4.
   Faire de l'Académie, de l'Institut, élire membre de l'Académie, de l'Institut.
   Il faudra le faire de l'Académie ; après avoir eu tant de prix, il est bien juste qu'il en donne, VOLT. Lett. Marmontel, 21 août 1767.
   Faire se dit aussi pour donner une profession. Il a fait son fils avocat, prêtre. Sa mère l'a faite couturière.
35°   Donner à quelqu'un certaine qualité, condition, avec un nom de personne pour sujet.
   Disposez de mon sang, les dieux vous en font maître, CORN. Hor. v, 1.
   Vous m'aurez faite heureuse, et c'est assez pour vous, CORN. Perthar. II, 1.
   Un autre peintre lui faisait voir le tableau d'une Hélène qu'il avait peinte avec soin et qu'il avait ornée de beaucoup de pierreries, il lui dit : Oh mon ami, n'ayant pu la faire belle, vous avez voulu du moins la faire riche, ROLLIN Hist. anc. Oeuv. t. II, 1re part. p. 172, dans POUGENS..
   On a trahi le fils, on fait la mère esclave, VOLT. Mérop. II, 4.
   Madame d'Ostalis et moi, nous sommes ce qu'on nous a faites, GENLIS Ad. et Théod. t. II, lett. 29, p. 259, dans POUGENS..
   Faire quelqu'un dupe, le tromper. Il m'a fait sa dupe.
   Donner un certain caractère.
   Enfin je veux vous faire ennemis légitimes, CORN. Hor. II, 6.
   J'ai fait des malheureux sans doute, et la Phrygie Cent fois dans votre sang a vu ma main rougie, RAC. Andr. I, 4.
   Prennent-ils donc plaisir à faire des coupables, Afin d'en faire après d'illustres misérables ?, RAC. Théb. III, 2.
   Et je vous ferai juge entre Athalie et lui, RAC. Athal. v, 2.
   De deux fils que j'aimai les dieux m'avaient fait père, VOLT. Brutus, v, 7.
   Sophonisbe en ces lieux peut faire des perfides, VOLT. Soph. IV, 1.
   La raison fait des philosophes, et la gloire fait des héros ; la seule vertu fait des sages, VAUVENARGUES. Max. 531.
   Avec un nom de chose pour sujet.
   Et nous verrons ainsi que fait mieux un brave homme Des leçons d'Annibal, ou de celles de Rome, CORN. Nicom. I, 3.
   Les exploits Qui vous ont fait l'envie et la terreur des rois, ROTR. Bélis. V, 3.
   Inspirez-nous cette bonne volonté qui fait les justes, MASS. Carême, Tiédeur, 1.
36°   Terme de bourse. La rente, la bourse a fait tant, c'est-à-dire le taux de la rente, de la bourse a été de tant.
   Terme de finances. Faire les deniers bons, se rendre garant du payement d'une somme. Locution vieillie.
   Terme de jeu. Faire bon, répondre qu'on payera tout ce qu'on perdra au delà de ce qui est au jeu. Faire bon partout. Faire bon de tout.
37°   Il se dit des personnes qu'on se concilie, qu'on s'attache, etc.
   Faisons des protecteurs sans faire d'ennemis, CORN. Théod. II, 2.
   Tout ami dit : j'ai fait un ami, et ce lui est une grande joie, BOSSUET Polit. X, IV, 3.
   En un soir, ce n'est pas être heureux à demi, Je trouve un doux asile et je fais un ami, COLLIN D'HARLEV. Chât. en Esp. II, 11.
   Faire une maîtresse, gagner l'amour d'une femme.
   Tous sauraient comme lui, pour faire une maîtresse, Perdre le souvenir des beautés de leur Grèce, CORN. Toison d'or, I, 2.
   Cléon fait chaque jour de nouvelles maîtresses, DESTOUCHES Dissip. I, 2.
   Très familièrement. Faire une femme, se dit pour faire une maîtresse.
   Faire un amant, en parlant d'une femme.
   Il est vrai, jusqu'ici je n'ai point fait d'amants ; Mais je n'ai point encor passé le temps d'en faire, HAUTEROCHE Bourg. de qualité, I, 5.
   Aussi, m'a-t-on dit, n'avait-elle guère fait d'amants, mais beaucoup d'amis et même d'amies, MARIV. Mariane, 4e part..
38°   Représenter un personnage. Faire les amoureux, les valets.
   Et qui fait les rois parmi vous ?, MOL. Impr. 1.
   Mme de Caylus fait Esther, SÉV. 572.
   Faire tel ou tel personnage, se donner pour avoir telle ou telle qualité. L'un devait faire le maître, et l'autre le valet.
   Fig. Faire un sot personnage, un plat personnage, figurer d'une manière peu honorable, désagréable, ou nulle, parmi d'autres personnes, dans une affaire.
39°   Prendre le caractère de, jouer le rôle de.
   D'une vaine parure inutile à sa peine, Elle peut acquérir de quoi faire la reine, CORN. Médée, III, 2.
   Ce serait à vos yeux faire la souveraine, CORN. Nicom. III, 1.
   Il me souvient que votre oncle a déjà commencé par un soufflet, à faire le Jupiter sur mon visage, HAUTEROCHE le Cocher, sc. 6.
   Tandis que ce nigaud, comme un évêque assis, Fait le veau sur son âne et pense être bien sage, LA FONT. Fabl. III, 1.
   Il n'est pas jusqu'au savant Usser qui n'ait voulu, à ce qu'on prétend, faire le prophète, BOSSUET Variat. XIII, § 41.
   Leur Confutzée, que nous appelons Confucius, n'imagina ni nouvelles opinions, ni nouveaux rites ; il ne fit ni l'inspiré, ni le prophète ; c'était un sage magistrat, qui enseignait les anciennes lois, VOLT. Moeurs, introd. Chine..
   C'est alors que Pierre dit : Mon frère Charles veut faire l'Alexandre, mais il ne trouvera pas en moi un Darius, VOLT. Russie, I, 16.
   Viens, Camille, Soupe avec nous, Que nous fassions les fous, BÉRANG. Bonne fille..
   Feindre d'être ce qu'on n'est pas.
   Ainsi la cruauté fait la douce, et paraît officieuse et bienfaisante, BALZAC 5e disc. sur la cour..
   Dorante avec chaleur fait le passionné, CORN. le Ment. IV, 8.
   Rien ne vous sert ici de faire le surpris, CORN. Rodog. II, 3.
   Tu fais adroitement le doux et le sévère, CORN. Perthar. IV, 2.
   En vain par politique il fait ailleurs l'amant, CORN. Tite et Bérén. III, 1.
   Je ferai le vengeur des intérêts du ciel, MOL. Festin, v, 2.
   Je connus que j'avais trop fait le janséniste, PASC. Prov. I.
Mettre de l'affectation à se montrer avec telle ou telle qualité.
   Tu me braves, Cinna, tu fais le magnanime, CORN. Cinna, v, 1.
   Ce trône refusé dont vous faites le vain, CORN. Tois. d'or, III, 1.
   Vous faites hors de temps le brave et le rebelle, MAIR. Soliman, v, 8.
   Elle [l'idolâtrie] faisait quelquefois la respectueuse envers la divinité, BOSSUET Hist. II, 12.
   On fait le philosophe et l'esprit fort, et l'on est en secret le pécheur le plus rampant, MASS. Carême, Doutes sur la religion.
   Me voilà forcé par vous-même à m'exposer à toute la méchanceté de mes ennemis, à tout le ridicule d'un vieillard qui veut faire le jeune homme, et à tous les chagrins qui peuvent suivre un tel désagrément, VOLT. Lett. d'Argental, 3 oct. 1777.
   Se donner certains airs, prendre certaines manières. Il fait l'impertinent. Faire le dégoûté.
   Elle [mouche] s'en attribue uniquement la gloire, Va, vient, fait l'empressée, LA FONT. Fabl. VII, 9.
   Cette D*** fait la personne de qualité, SÉV. 216.
   La vanité de faire l'éclairée quand je ne le suis pas, SÉV. 434.
   Faire le mort, faire semblant d'être mort.
   L'autre plus froid que n'est un marbre Se couche sur le nez, fait le mort, tient son vent, LA FONT. Fab. v, 20.
   Fig. et familièrement. Faire le mort, dissimuler.
   Faire du, trancher de, simuler.
   Et faisant des mourants et de l'âme saisie, RÉGNIER Sat. XIII.
   Il fait de l'insensible, afin de mieux surprendre, CORN. Rodog. IV, 6.
   J'ai fait du souverain et j'ai tranché du brave, ROTR. Vencesl. IV, 2.
   Un tel aveu vous surprend et vous touche ; Mais faire ici de la petite bouche Ne sert de rien...., LA FONT. Calendrier..
   Apparemment Lanoue n'eût point fait du prophète s'il n'eût eu de ces présages politiques devant les yeux qui sont bien plus certains que les présages de la superstition, BAYLE Lettre sur les comètes, p. 529.
   Faire de son drôle, faire le brave, et aussi avoir des succès.
   J'ai bravé ses armes assez longtemps [de l'amour] et fait de mon drôle comme un autre, MOL. Princ. d'Él. II, 2.
   J'ai ouï dire, moi, que vous avez été autrefois un bon compagnon parmi les femmes ; que vous faisiez de votre drôle avec les plus galantes de ce temps-là, MOL. Scapin, I, 6.
40°   Causer, déterminer, procurer, avec un nom de personne pour sujet.
   Quand je lui veux partout faire des ennemis, CORN. Sertor. v, 1.
   ... Ou mille empêchements que vous ferez vous-même, CORN. Nicom. v, 5.
   Et j'aurais cette honte en ce funeste sort D'avoir prêté mon crime à faire votre mort, CORN. Oedipe, II, 4.
   Que m'importe qu'il [le ciel] montre un visage plus doux Quand il fait des malheurs qui ne sont que pour nous, CORN. ib. v, 11.
   C'est à l'heur du retour que leur courage aspire Et non pas à l'honneur de me faire un empire, CORN. Tois. d'or, I, 3.
   Notre gloire, il est vrai, deviendra sans seconde, Si nous faisons sans eux la liberté du monde, CORN. Sertor. II, 2.
   Et je vous consolais au milieu de vos plaintes, Comme si notre Rome eût fait toutes nos craintes, CORN. Hor. I, 1.
   [Ma mort].... Ferait une triste et prompte occasion De rejeter l'État dans la division, CORN. Pulch. II, 2.
   Si dans les différends que le ciel vous peut faire, CORN. Suréna, III, 1.
   Malgré toute la puissance romaine on voyait les chrétiens, sans révolte, sans faire aucun trouble, changer la face du monde et s'étendre par tout l'univers, BOSSUET Hist. II, 7.
   Si on le vit faire des réconciliations sincères dans ces lieux où l'on dissimule les haines et où l'on ne les quitte pas, FLÉCH. Panég. II, p. 353.
   Un roi victorieux nous a fait ce loisir, RAC. Esth. Prol..
   .... Par quel charme.... Bajazet a pu faire un si grand changement, RAC. Bajaz. III, 1.
   Vous ferez d'un seul mot le sort de cet empire, VOLT. Orphel. v, 4.
   Occupez le sénat, faites-lui des coupables, M. J. CHÉN. Tib. III, 2.
   Fig. Faire la pluie et le beau temps, régler tout à son gré.
   Je fais comme il me plaît le calme et la tempête, RAC. Esth. III, 5.
   Avec un nom de chose pour sujet.
   Cet Achille de qui la pique Faisait aux braves d'Ilion La terreur que fait en Afrique Aux troupeaux l'assaut d'un lion, MALH. III, 1.
   Car Chimène aisément montra par sa conduite Que la haine aujourd'hui ne fait pas sa poursuite, CORN. Cid, v, 4.
   La sienne [estime] dans la cour lui fait mille jaloux, CORN. Nicom. III, 8.
   La paix calme l'effroi que me fait la bataille, CORN. Hor. IV, 4.
   Ce qui fait nos frayeurs ne peut le mettre en peine, CORN. Poly. I, 3.
   Votre amour fait ma faute, il fera mon excuse, CORN. Pomp. IV, 3.
   Seigneur, l'occasion fait un coeur différent, CORN. Nicom. IV, 5.
   Oui, je veux bien qu'on sache, et j'en dois être crue, Que le sort offre ici deux objets à ma vue, Qui, m'inspirant pour eux différents sentiments, De mon coeur agité font tous les mouvements, MOL. Éc. des mar. II, 14.
   Ce nom [de gentilhomme] ne fait aucun scrupule à prendre, MOL. Bourg. gent. III, 12.
   Vous voyez ce que la douceur a fait sur son esprit, SÉV. 578.
   Leur attente frustrée fait leur supplice, BOSSUET Hist. II, 13.
   La joie importune De tant d'amis nouveaux que m'a faits la fortune, RAC. Bérén. I, 4.
   Une fontaine qui coulait dans un coin y faisait un doux murmure qui appelait le sommeil, FÉN. Tél. IV.
   Vous devez sentir le vide de tout ce qui fait l'agitation et l'empressement des autres hommes, MASS. Carême, Prosp. temp..
   C'est, sire, mon extrême et respectueuse tendresse pour votre personne.... qui, plus que tout, me fait du désir [m'inspire le désir] de me rapprocher de votre majesté, SAINT-SIMON t. VIII, p. 242, édit. CHÉRUEL..
   De grands États, tels que la Bourgogne, l'Artois, la Flandre, la Bretagne, la Guyenne, relevants de la couronne, faisaient toujours l'inquiétude du prince beaucoup plus que sa grandeur, VOLT. Moeurs, 75.
   Cet habile naturaliste a remarqué, dans une lave grise, pesante et très dure, des cristaux assez gros, mais confus, lesquels réduits en poudre ne faisaient aucune effervescence avec l'acide nitreux, BUFF. Min. t. III, p. 125, dans POUGENS..
   Cela ne lui fait ni chaud ni froid, cela lui est tout à fait indifférent.
   Cela ne fait ni chaud ni froid, cela est indifférent, ne nuit ni ne sert.
41°   Être, constituer.
   C'est gloire de passer pour un coeur abattu Quand la brutalité fait la haute vertu, CORN. Hor. IV, 4.
   Il fait toute ma gloire, il fait tous mes désirs ; Ne devrait-il pas faire aussi tous mes plaisirs ?, CORN. Tite et Bérén. I, 1.
   L'habit fait la doctrine, PASC. Prov. 4.
   Quoiqu'ils ne refusent en effet que de reconnaître que Jansénius ait tenu ces propositions qu'ils condamnent, ce qui ne peut faire d'hérésie, PASC. ib. 17.
   La pensée qui fait l'être de l'homme, PASC. dans COUSIN.
   L'humilité d'un seul fait l'orgueil de tous, PASC. dans COUSIN.
   Les nouvelles d'Allemagne font toute notre attention, SÉV. 202.
   Les petites vertus qui font l'agrément de la société, SÉV. 266.
   Huit ou neuf ans au plus, dont on pourrait disputer sur un compte de 490 ans, ne feront jamais une importante question, BOSSUET Hist. II, 4.
   Toutefois cette vérité faisait si peu un dogme universel de l'ancien peuple, que les Saducéens, sans la reconnaître, non-seulement étaient admis dans la synagogue, mais encore élevés au sacerdoce, BOSSUET ib. 6.
   Le sang des Ottomans dont vous faites le reste, RAC. Baj. II, 3.
   Que Dieu fera toujours le premier de vos soins, RAC. Athal. IV, 3.
   Ils vont jusqu'à un certain point qui fait les bornes de leur capacité, LA BRUY. I.
   La crainte fait presque toute notre religion, MASS. Car. Confess..
   Consolez mes vieux ans dont vous faites l'espoir, VOLT. Tancr. I, 4.
   L'amour du genre humain qui fait mon caractère, VOLT. Lett. Prusse, 2.
   Le nom de phénicoptère, oiseau à l'aile de flamme, est un exemple de ces rapports sentis qui font la grâce, l'énergie du langage de ces Grecs ingénieux, BUFF. Ois. t. XVI, p. 294, dans POUGENS.
   On dit dans un sens analogue, faire un bon avocat, un bon soldat, etc. avoir les qualités qui font le bon avocat, le bon soldat, etc.
   Pour faire un bon mari vous aimez trop les femmes, DE BIÈVRE Séducteur, II, 2.
42°   Il se dit aussi de choses qui, par leur réunion, forment un tout, un ensemble. Deux et deux font quatre. Les qualités qui font le grand homme.
   Les plébéiens qui faisaient toujours le plus grand nombre dans ces assemblées, VERTOT Révol. rom. III, 259.
   On trouva que le nombre des citoyens pubères faisait à Rome le quart de ses habitants, MONTESQ. Rom. III.
43°   Faire tout, avoir la suprême influence, être décisif.
   L'argent faisait tout à Rome, BOSSUET Hist. I, 9.
   Les dates font tout en cette matière, BOSSUET ib. II, 13.
   Les caractères de Guillaume et de Jacques firent tout, VOLT. Louis XIV, 15.
   D'un bout du monde à l'autre bout L'habit fait tout, BÉRANG. Vieux hab..
   Qu'est-ce que cela fait ? c'est-à-dire quelle influence cela a-t-il ? Qu'est-ce que cela fait à notre sujet ?, BOSSUET Nouv. myst. 10.
   Qu'est-ce que le nom fait à la chose ?, VOLT. Phil. ignor. 13.
   Familièrement. Qu'est-ce que cela fait là ? c'est-à-dire à quoi cela sert-il en ce lieu-là ?
   Qu'est-ce que cela me fait ? que m'importe ?
   Ne rien faire à.... Être sans importance dans....
   Rien n'y font les soupçons, LA FONT. F. avare.
   Hérès chez Platon ne ressuscita à la vérité que pour quinze jours ; mais c'était toujours une résurrection, et le temps ne fait rien à l'affaire, VOLT. Dict. phil. Résurrection, 3.
   Quoique les noms ne fassent rien à la nature, c'est cependant rendre service à ceux qui l'étudient que de les leur interpréter, BUFF. Quadrup. t. V, p. 165, dans POUGENS.
44°   Représenter comme, en parlant de personnes ou de choses.
   Ils reçoivent à bras ouverts un banni qui leur fait aisée la conquête de son pays, BALZAC 2e discours..
   Mais je vous vois, Maxime, et l'on vous faisait mort, CORN. Cinna, IV, 5.
   L'indignité.... Dont je connais qu'à tort je te faisais l'auteur, ROTR. Bélis. I, 2.
   Mais, las ! il le fait, lui, si rempli de plaisirs [le mariage], Que de se marier il donne des désirs, MOL. Éc. des f. v, 4.
   Je viens d'apprendre que celui que tout le monde faisait auteur de vos apologies les désavoue, PASC. Prov. 16.
   Il n'est pas si terrible qu'on le fait, MASS. Carême, Fausse conf..
45°   Évaluer à un certain prix. Combien faites-vous le mètre de velours ? dix francs.
   Le marchand fit son chantre mille écus, et son grammairien trois mille, LA FONT. Vie d'Ésope..
46°   Allouer, en parlant d'une somme.
   C'était bien peu de ne faire que 100 livres à une fille qui avait apporté 8000 livres, BOSSUET Lett. relig. 76.
   Faire les fonds, fournir l'argent nécessaire. C'est lui qui a fait les fonds de cette entreprise.
47°   Terme de grammaire. Avoir une certaine désinence ou flexion. Cheval fait au pluriel chevaux.
48°   Rendre des excréments. Ce malade fait tout sous lui. Faire du sang, de la bile, des glaires, rendre du sang, de la bile, des glaires avec les selles.
   Ai-je bien fait de la bile ?, MOL. Mal. imag. I, 2.
   Absolument. Rendre ses excréments.
   Le duc de Gesvres voulut faire le gaillard au souper de la noce ; il en fut puni ; il fit partout dans le lit, SAINT-SIMON 115, 258.
   Quand vous aurez fait, vous couvrirez de terre vos excréments, VOLT. Phil. IV, 209.
   Faire dans ses chausses, laisser aller ses excréments dans sa culotte ; et fig. avoir une peur extrême.
   La postérité ne se doutera jamais combien, dans ce siècle de lumières et de batailles, il y eut de savants qui ne savaient pas lire et de braves qui faisaient dans leurs chausses, P. L. COUR. Lett. I, 132.
   Faire de l'eau, uriner.
   Faire du sable, faire une pierre, rendre du sable, une pierre avec l'urine.
49°   Chemin faisant, tout en cheminant ; locution qui est par inversion pour : en faisant chemin.
   Chemin faisant, il vit le cou du chien pelé, LA FONT. Fabl. I, 5.
50°   Faire, suivi d'un adjectif pris adverbialement.
   Faire court, abréger.
   Mais bientôt il le prit en homme de courage, En galant homme et, pour le faire court, En véritable homme de cour, LA FONT. Joc..
   Faire ferme, s'arrêter pour tenir tête à l'ennemi.
   Les Tyriens, voyant les ennemis maîtres de leur rempart, se retirèrent vers la place d'Agénor, où ils firent ferme, ROLLIN Hist. anc. Oeuvres, t. VI, p. 287, dans POUGENS.
   Faire, avec un adverbe de quantité, autant, plus, assez.
   Je crois faire pour elle autant que vous pour Rome, CORN. Hor. II, 3.
   Quand on a assez fait auprès de certaines personnes pour avoir dû se les acquérir, si cela ne réussit point, il y a encore une ressource qui est de ne plus rien faire, LA BRUY. IV.
   J'ai fait plus que maint duc et pair Pour mon pays que j'aime, BÉRANG. Vivand..
   Faire tant, en venir à.
   L'aigle et le chat-huant leurs querelles cessèrent, Et firent tant qu'ils s'embrassèrent, LA FONT. Fabl. v, 18.
   À tant faire que de choisir, encore faut-il avoir ce qu'il y a de mieux.
51°   Faire, construit avec la particule en. En faire de même, agir, se comporter semblablement.
   C'est que je l'aime et qu'on estime Qu'elle en fait de même de moi, MALH. V, 20.
   En faire trop, assez.
   Quelle illusion ! de peur d'en faire trop pour Dieu, on ne fait rien du tout, MASS. Carême, Mort..
   On se reproche de n'en pas faire assez pour une fortune de boue, MASS. ib..
   En faire autant, faire la même chose.
   Une autre la suivit, une autre en fit autant, LA FONT. Fabl. III, 4.
   En faire à sa tête, ne faire que sa volonté.
   Qui voulant en faire à sa tête, LA FONT. Fabl. II, 10.
   En faire à deux fois, se reprendre plus d'une fois à quelque chose, avoir de l'hésitation.
   Sans en faire à deux fois, je vous conjure d'embrasser...., SÉV. 80.
   En faire à quelqu'un pour un bras, lui casser un bras en le battant.
   J'en suis pour mon honneur ; mais à toi qui me l'ôtes, Je t'en ferai du moins pour un bras ou deux côtes, MOL. Sgan. 6.
   Populairement. Je croyais m'en tirer avec cent sous, je m'en suis fait pour quinze francs, c'est-à-dire la dépense s'est élevée à quinze francs.
52°   Faire, construit avec un infinitif. Dans cette construction, faire donne à la phrase un sens causatif ; c'est par cet artifice que le français a remplacé les verbes causatifs qui se trouvent dans certaines langues ; aussi, en cet emploi, le participe fait est toujours invariable : les soupçons qu'il a fait naître, et non qu'il a faits naître, parce que faire naître est considéré comme un seul mot. En cet emploi faire a trois sens : être cause que ; charger de ; attribuer à.
   Être cause que.
   Cela fait dire à Cicéron que.... Que le sort favorable Lui fasse rencontrer un ami secourable, MALH. I, 4.
   Qui le fait se charger du soin de ma famille ? Qui le fait, malgré moi, vouloir venger ma fille ?, CORN. Hor. v, 3.
   Mais, seigneur, je m'emporte, et l'excès d'un tel heur Me fait vous en parler avec trop de chaleur, CORN. Sertor. I, 3.
   Il a fait entendre les sourds et parler les muets, SACI Bible, Év. St Marc, VII, 37.
   J'ai pâli du dessein qui vous a fait sortir, RAC. Phèdre, IV, 6.
   [Calchas] Fera taire nos pleurs, fera parler les dieux, RAC. Iphig. I, 1.
   Je le fis nommer chef de vingt rois ses rivaux, RAC. ib. III, 6.
   L'amour d'une vaine gloire vous a fait parler sans prudence, FÉN. Tél. IV.
   La nature n'a-t-elle pas imposé une grande peine au peuple et aux malheureux de les avoir fait naître dans la dépendance ?, MASS. Pet. carême, Hum. des grands..
   Faire faire, être cause qu'on fait.
   Vous savez les honneurs qu'on fit faire à son ombre, CORN. Poly. I, 4.
   Télémaque prend ces armes, don précieux de la sage Minerve, qui les avait fait faire par Vulcain, FÉN. Tél. XVIII.
   Avec faire, on supprime d'ordinaire le pronom personnel d'un verbe réfléchi. Je l'en ferai repentir.
   Je ne feindrai pas de vous dire que le hasard nous a fait connaître il y a six jours, MOL. Mal. im. I, 5.
   Les mauvais traitements qu'il me faut endurer Pour jamais de la cour me feraient retirer, MOL. Fâcheux, III, 2.
   Familièrement. Je ne lui fais pas dire, ou, ce qui est plus usité aujourd'hui, je ne le lui fais pas dire, il le dit de lui-même, c'est sa propre pensée, et non une pensée que je lui suggère.
   Vous l'entendez, monsieur, je ne lui fais pas dire, DANCOURT Bourg. à la mode, IV, 6.
   Charger de. Je ferai bâtir ma maison à ou par cet architecte. Il fit faire ses habits à ou par un mauvais tailleur. J'ai fait dire par un messager au médecin de venir.
   Attribuer, prétendre. Vous faites dire à Cicéron une chose qu'il n'a jamais dite.
   Et faisant faussement parler les immortels, ROTROU Antig. v, 5.
   À qui Strabon fait traverser l'Europe, BOSSUET Hist. I, 7.
   Le sang de ces héros dont tu me fais descendre, RAC. Iphig. V, 6.
   Cessez de démentir Le sang des demi-dieux dont on me fait sortir, VOLT. Mér. IV, 2.
53°   Faire à savoir, faire connaître.
   Si j'avais du crédit en France, je ferais publier à son de trompe : On fait à savoir que, quand les Jacobins disent que la grâce suffisante est donnée à tous, ils entendent que tous n'ont pas la grâce qui suffit effectivement, PASC. Prov. 1.
   On fait à savoir à tous qu'un tel n'est pas heureux, P. L. COUR. Lett. II, 12.
   Génin a établi par de bonnes raisons, ce semble, qu'il faut lire assavoir, ancien verbe (voy. assavoir) qui fut jadis très employé. Il est de fait que dans ces sortes de constructions faire ne prend pas la préposition à. On trouve, il est vrai, dans la vieille langue des tournures telles que il fait à louer ; mais cela signifie non pas : il fait louer, mais : il agit de manière à être loué, il fait chose à louer.
   La Fontaine a dit simplement, dans le même sens, faire savoir.
   De par le roi des animaux Fut fait savoir à ses vassaux, LA FONT. Fabl. VI, 14.
54°   V. n. Opérer, travailler, se comporter.
   Il apprendrait à vaincre en me regardant faire, CORN. Cid, I, 3.
   Allons donc les voir faire et montons à la tour, CORN. Pomp. I, 4.
   Le cerf ne pleura point, comment eût-il pu faire ? Cette mort le vengeait ; la reine avait jadis Étranglé sa femme et son fils, LA FONT. Fabl. VIII, 14.
(l'édition originale est ainsi ; les éditions modernes ont, à tort : comment l'eût-il pu faire).
   Faites, prenez parti ; que rien ne vous arrête, Et ne me rompez pas davantage la tête, MOL. Mis. IV, 3.
   Il faut faire et non pas dire ; et les effets décident mieux que les paroles, MOL. Fest. de P. II, 5.
   Que ne laissiez-vous un peu faire à la Providence ?, SÉV. 430.
   L'attaque se fit avec une vigueur extraordinaire, et dura trois bons quarts d'heure ; car les ennemis se défendirent en fort braves gens ; mais comment auraient-ils pu faire ? pendant qu'ils étaient aux mains, tout notre canon tirait, sans discontinuer, sur les deux demi-lunes, RAC. Lett. à Boileau, 3 avril 1691.
   En vérité, dit-il, voilà un grand embarras ! laissez-moi faire, FÉN. Tél. VII.
   Voyant d'autres gens entrer, je fis comme eux, on me laissa faire, J. J. ROUSS. Confess. II.
   Juger est une chose, et faire est une autre, DIDEROT Salon de 1765, Oeuvres, t. XIII, p. 318, dans POUGENS..
   L'intérêt personnel et l'habitude générale en dérobent le crime et la bassesse ; je fais, dit-on, comme font les autres, et l'on se plie à des actions contre lesquelles la conscience cesse bientôt de réclamer, RAYNAL Hist. phil. XIX, 6.
   Faire, être employé, avoir part aux affaires, à l'administration, au gouvernement.
   Le maréchal de Lorge, qui voulait faire, qui en sentait les moyens, ne cessait de proposer le siége de Mayence, SAINT-SIMON 37, 168.
   [Le duc de Duras] c'était un fort honnête homme et fort aimé, brave, doux, voulant faire, mais sans aucun esprit, SAINT-SIMON 50, 86.
   Façon de faire, manière de faire, façon, manière dont on agit, dont on se comporte.
   J'ai hésité si je ne rapporterais pas cette espèce aux hirondelles de rivage, dont elle paraît avoir quelques façons de faire, BUFF. Ois. t. XII, p. 356, dans POUGENS.
   Avoir du savoir-faire, voy. savoir-faire.
   Ainsi fit-il, aussi fit-il, se dit par inversion, il fit ainsi.
   Je lutte comme Jacob, mais il adora l'ange après avoir lutté, aussi fais-je, VOLT. Lett. d'Argental, 23 juillet 1744.
Faire, avec un adverbe ou une locution adverbiale, se comporter comme l'indiquent l'adverbe ou la locution.
   Ayez soin que tous deux fassent en gens de coeur, CORN. Cid, IV, 5.
   N'empêchez point de bien faire celui qui le peut ; faites bien vous-même, si vous pouvez, SACI Bible, Prov. de Salom. III, 7.
   Çà, voyons un peu comme vous ferez, MOL. Pourc. III, 2.
   J'avais mangé de l'ail et fis en homme sage De détourner un peu mon haleine de toi, MOL. Amph. II, 3.
   C'est faire en honnêtes gens que de débuter par là, MOL. Préc. 5.
   Et l'on a trouvé que S. M. ne pouvait mieux faire que de jeter les yeux sur un si bon sujet, SÉV. 407.
   J'y ferai de mon mieux, SÉV. 556.
   Quand le Seigneur vous l'aura mise entre les mains [une ville], vous passerez au fil de l'épée tout ce qu'elle aura de combattants, en épargnant les femmes, les enfants et les animaux ; vous ferez ainsi à toutes les villes éloignées, BOSSUET Polit. IX, V, 6.
   Ceux qui font bien mériteraient d'être enviés, s'il n'y avait encore un meilleur parti à prendre, qui est de faire mieux, LA BRUY. IV.
   Bien faire, signifie quelquefois agir à propos.
   Pour bien faire, il faudrait que vous le prévinssiez, RAC. Andr. II, 1.
   Bien faire, faire du bien.
   Le plaisir de bien faire est un plaisir céleste, TRISTAN Mort de Chr. II, 6.
   La miséricorde divine ne cesse jamais de bien faire aux hommes, BOSSUET Pénit. 1.
   Dans plusieurs provinces on dit qu'une femme est en train de bien faire, pour exprimer qu'elle est enceinte.
   Faire bien, se bien conduire.
   La comtesse de Guiche [qui venait de perdre son mari] fait fort bien ; elle pleure quand on lui conte les honnêtetés et les excuses que son mari lui a faites en mourant, SÉV. 173.
   Bien faire, mal faire, se comporter bien, mal dans un combat.
   Voilà notre avant-garde à bien faire animée, MOL. Amph. I, 1.
   Voyant que son régiment faisait mal, SÉV. 207.
   M. le duc était lieutenant général de jour, et fit à la Condé c'est tout dire, RAC. Lett. à Boileau, 15 juin 1692.
   Être prêt à bien faire, être tout disposé aux plaisirs de la table, de l'amour.
   .... Étant donc la donzelle Prête à bien faire, LA FONT. Orais..
   Nous étions à table, plusieurs, joyeux, en devoir de bien faire, P. L. COUR. Pamphl. des pamphl..
   Faire bien, avoir du succès, réussir.
   Quand il veut prendre la peine de parler, il fait très bien, SÉV. 183.
   Le voilà dans le monde, il y fait fort bien, SÉV. 498.
   Faire bien, faire mal, s'assortir, ne pas s'assortir, produire un bon, un mauvais effet. Le bleu et le jaune font bien l'un avec l'autre. Ce tableau ferait mieux ailleurs.
   Ces deux adverbes joints font admirablement, MOL. F. sav. III, 2.
   Il a laissé un petit bois sombre qui fait fort bien, SÉV. 202.
   Faire bien ou mal à, en parlant des personnes, faire bon accueil.
   Le roi fit fort bien à M. de Pomponne, SÉV. 408.
   Il [le duc de Bourgogne] salua Mme de Maintenon qui lui fit fort bien, SAINT-SIMON 214, 136.
   Faire bien à, en parlant des choses, être agréable, utile. Le déjeuner m'a bien fait, je me trouve bien d'avoir déjeuné.
   Faire bien ou mal, ou tout autre adverbe ou locution adverbiale avec de, avoir raison, tort de.... Ne ferions-nous pas mieux d'accepter le parti ?, CORN. Sertor. IV, 3.
   Et fit très sagement de changer de logis, LA FONT. Fabl. III, 8.
56°   Faire à quelqu'un, lui causer une certaine impression.
   Il est gai, il est content, il est favori de M. de Turenne ; comment vous fait ce nom ?, SÉV. 607.
   Le roi était accoutumé au visage de Mme de Saint-Simon par les Marly et par la voir souvent à la suite de Mme la duchesse de Bourgogne, choses d'habitude qui lui faisaient infiniment, SAINT-SIMON 274, 202.
   Rien ne lui fait, il est insensible aux avis, aux reproches, etc.
57°   Faire des armes, s'exercer à l'escrime.
58°   Faire, avoir une part dans le jeu, dans une affaire.
   Il partagea le prix avec le prince de la Roche-sur-Yon, parce qu'ils avaient fait de moitié ; mais ce marché fut un peu désapprouvé, DANGEAU I, 131, 4 mars 1685.
59°   Faire que, agir de manière que, avec l'indicatif quand la phrase est affirmative et à l'indicatif : Cela fait qu'on vient, cela fera qu'on viendra ; avec le subjonctif, quand on veut exprimer un souhait, un désir, un but qu'on se propose : Faites qu'on vienne.
   Fais que jamais rien ne l'ennuie, MALH. II, 3.
   Fais que je porte envie à ta vertu parfaite, CORN. Cinna, IV, 6.
   Est-on d'une figure à faire qu'on se raille ?, MOL. Psyché, I, 1.
   Et faisons qu'à ses fils il ne puisse dicter Que des conditions qu'ils voudront accepter, RAC. Mithr. I, 5.
   Ses dernières comédies font qu'on s'étonne qu'il ait pu tomber de si haut, LA BRUY. I.
   Tout cela fait qu'on vit et meurt plus tôt, RAYNAL Hist. phil. I, 8.
   Fasse que ou fassent que, se dit par forme de souhait.
   Fasse le juste ciel.... Que ces longs cris de joie étouffent vos soupirs, CORN. Pomp. v, 5.
60°   Finir.
   Nous n'aurions jamais fait, si nous voulions prendre à coeur les affaires du monde, BALZ. liv. II, lett. 1.
   Leurs coiffures toujours sont pour moi des supplies ; Jamais elles [les femmes] n'ont fait, j'en suis au désespoir, TH. CORN. l'Inconnu, v, 4.
   Je n'aurais jamais fait si je voulais vous en faire le détail, SÉV. 180.
   Monsieur, peut-on entrer ? - Non, monsieur, ou je meure. - Hé ! pourquoi ? j'aurai fait en une petite heure, RAC. Plaid. II, 10.
   On n'a jamais fait avec lui, c'est-à-dire il ne finit rien, il demande toujours.
   Il a fait à moi, il a fait avec moi, nous avons rompu, nous ne sommes plus amis ; cette phrase a vieilli.
   Et dès ce moment elle eût fait avec lui, HAMILT. Gramm. 4.
61°   Faire de, avec ainsi, comme, etc. se comporter à l'égard de.
   Tout homme bien sage Doit faire des habits ainsi que du langage, MOL. Éc. des mar. I, 1.
   Je voudrais bien qu'on fît de la coquetterie Comme de la guipure et de la broderie, MOL. ib. II, 9.
62°   Faire pour quelqu'un, le suppléer, tenir sa place, et aussi être son agent, son commissionnaire, sa caution.
63°   Faire dans les draps, être négociant en draps.
   Faire en meubles, se dit de toutes les fournitures nécessaires pour garnir les meubles : laines, crins, étoffes, etc. Marchand de literie et de faire en meubles.
64°   Faire pour, travailler pour.
   Tu ne fais que pour toi, s'il t'en faut récompense, CORN. Perthar. II, 5.
   Et comme ils font pour eux, faisons aussi pour nous, CORN. Nicom. IV, 6.
   Faire pour, faire contre, être favorable à, contraire à, avec un nom de personne pour sujet.
   Il faut avec vigueur ranger les jeunes gens, Et nous faisons contre eux à leur être indulgents, MOL. Éc. des f. v, 7.
   Est-ce donc faire pour le progrès d'une langue que de...., LA BRUY. XIV.
   Il y a une ville dans la Judée qui a toujours fait contre vous, elle s'appelle Nazareth, VOLT. Phil. v, 278.
   Avec un nom de chose pour sujet.
   C'est ce qui fait pour vous, et sur ces conséquences Votre amour doit fonder de grandes espérances, MOL. Éc. des m. I, 6.
65°   Avoir une influence, un effet quelconque. L'argent fait plus auprès de lui qu'aucune recommandation
   Faire à. importer à, contribuer à.
   J'ai tâché d'expliquer celles [les expériences] qui faisaient le plus à mon sujet, DESC. Diopt. 2.
   Même si cela fait à votre allégement, J'avouerai qu'à lui seul en est toute la faute, MOL. Dép. am. III, 4.
66°   Dire, répliquer ; Il n'est d'usage que dans ces locutions familières d'ailleurs : Fait-il, fait-elle, fis-je, fit-il, fit-elle.
   Monsieur, au nom de Dieu, lui fais-je assez souvent, MOL. l'Ét. I, 9.
   Moi, j'ai blessé quelqu'un, fis-je tout étonnée, MOL. Éc. des f. II, 6.
67°   Avoir fort à faire, avoir beaucoup d'efforts à faire pour venir à bout de quelque chose.
   Elle [la cour] aurait fort à faire et ses soins seraient grands D'avoir à déterrer le mérite des gens, MOL. Mis. III, 7.
68°   C'est à faire à.... de.... se dit de quelqu'un qu'on reconnaît pour très capable de faire une chose. C'est à faire à lui d'ordonner une fête.
   Absolument.
   Saint Paul, saint Augustin ont prêché, c'était à eux à faire, SÉV. 594.
   Ironiquement. C'est à faire à.... il ne convient pas. C'est à faire à vous à parler ainsi.
   C'est à faire à.... de.... il n'appartient qu'à.
   Devant une telle beauté C'est à faire à des insensibles De conserver leur liberté, CORN. Ode sur un prompt retour.
   C'est à faire aux insensés de compter sur une vie qui doit finir et qui peut finir à toute heure, ST-ÉVREM. Lett. à M. de Créquy..
   C'est à faire aux castors, dira l'Indien, de s'enfuir dans des tanières ; l'homme doit dormir à l'air dans un hamac suspendu à des arbres, J. J. ROUSS. Lett. à M. Philopolis..
   Absolument.
   Raisonner sur les affaires, délibérer longtemps, chercher la raison, la vérité, la justice avec application, selon eux c'est à faire au vulgaire, SAINT-RÉAL Usage de l'hist. Disc. 1.
   Fig. C'est à faire à du temps, le temps viendra à bout de.
   Philiste assurément tient son esprit charmé ; Je n'aurais jamais cru qu'elle l'eût tant aimé. - Alcidon, c'est à faire à du temps, CORN. la Veuve, II, 6.
   On dit aussi c'est à faire à.... à.... C'est à faire au vulgaire à sentir les fleurs, j'ai trouvé le moyen de les manger et de les boire, BALZ. Lett. II, 4.
   C'est à faire à, avec un infinitif, signifie aussi quitte pour (sens qui vieillit).
   Et s'il ose venir à quelque violence, C'est à faire à céder deux jours à l'insolence, CORN. Poly. v, 1.
   Vous coucherez aussi avec moi, si vous voulez. - J'ai ordre de coucher chez ma tante ; mais n'importe, c'est à faire à être un peu grondée, BARON Coquette et fausse prude, IV, 10.
   Qu'est-ce que de ne pas se produire par son beau côté ? c'est à faire à ne recevoir pas les louanges que l'on aurait remportées peut-être, BAYLE Projet d'un dict. critique, 1.
   C'est à faire à, il ne reste plus qu'à, tout ce qui est à faire c'est de.... (sens qui vieillit).
   Aujourd'hui l'on s'assemble, aujourd'hui l'on conspire, L'heure, le lieu, le bras se choisit aujourd'hui ; Et c'est à faire enfin à mourir après lui, CORN. Cinna, I, 2.
   C'est à faire à périr pour le meilleur parti, Il ne m'en peut coûter qu'une mourante vie, Que l'âge et les chagrins m'auront bientôt ravie, CORN. Pulch. II, 2.
69°   Ne faire que, suivi d'un infinitif, signifie incessamment. Il ne fait qu'étudier. Pendant son séjour à Bade, il ne fit que jouer.
   Ne faire que croître et embellir, se dit d'une jeune fille qui chaque jour devient plus grande et plus belle.
   Par extension, s'augmenter, devenir pire. Sa passion pour le vin ne fait que croître et embellir.
   En un autre sens, ne faire que, équivaut à seulement. Je n'ai fait que le voir, c'est-à-dire je l'ai vu seulement.
   Ces beaux lieux ne faisaient que lui rappeler le triste souvenir d'Ulysse, FÉN. Tél. I.
   Les uns voient croître en paix, jusqu'à l'âge le plus reculé, le nombre de leurs années ; il en est qui ne font que se montrer à la terre, MASS. Pensées de la mort..
   J'ai été bien malade cet hiver ; j'ai cru mourir ; mais je n'ai fait que vieillir, VOLT. Lett. Mme de Fontaine, 13 mars 1752.
70°   Ne faire que de, équivaut à tout à l'heure.
   Un prince qui pour lors ne faisait que de naître, CORN. Oedipe, IV, 3.
   Il ne fait que de sortir de ma chambre, SÉV. 70.
   Noé ne faisait que de mourir, BOSSUET Hist. II, 2.
71°   Faire sert à remplacer un verbe qu'il faudrait répéter, et prend alors la signification de ce verbe.
   Et comme ils font du vrai, du faux ils m'épouvantent [ils m'épouvantent par le faux, comme ils m'épouvantent par le vrai], RÉGNIER Élég. I.
   Elle [Albe] m'estime autant que Rome vous a fait, CORN. Hor. II, 3.
   L'exemple touche plus que ne fait la menace, CORN. Poly. III, 3.
   [Les oisillons] Se mirent à jaser aussi confusément Que faisaient les Troyens quand la pauvre Cassandre Ouvrait la bouche seulement, LA FONT. Fabl. I, 8.
   Ce baudet-ci m'occupe autant Que cent monarques pourraient faire, LA FONT. ib. VI, 11.
   Je veux savoir vos pensées à fond et vous connaître un peu mieux que je ne fais, MOL. Festin, III, 1.
   Ah ! que j'ai de dépit que la loi n'autorise à changer de mari comme on fait de chemise, MOL. Sgan. 5.
   Puisque me voilà éveillé, il faut que j'éveille les autres, et que je les tourmente comme on m'a fait, MOL. Prol. de la Princ. d'Él. 2.
   Il l'appelle son frère, et l'aime dans son âme, Cent fois plus qu'il ne fait mère, fils, fille et femme, MOL. Tart. I, 2.
   Il fallait cacher la pénitence avec le même soin qu'on eût fait les crimes, BOSSUET R. d'Anglet..
   Vous m'enverrez la traduction, ainsi que vous avez fait la latine, BOSSUET Lett. quiét. 317.
   Quand ils eurent résolu la mort de saint Paul, ils le livrèrent entre les mains des Romains comme ils avaient fait Jésus-Christ, BOSSUET Hist. II, 70.
   Les étrangers le connaissaient mieux que ne faisait une partie d'entre nous, FONTEN. Littre..
   Charles voulait braver les saisons comme il faisait ses ennemis, VOLT. Charles XII, liv. IV.
   Au milieu de ces troubles on parla de paix comme on fait toujours, VOLT. Russie, I, 16.
   Il ne faut pas confondre cet emploi du verbe faire avec les cas où faire, gardant sa signification propre, gouverne le pronom le qui représente un verbe précédent. Je voulais partir ; mais je n'ai pu le faire.
   Je lui prête mon bras, et veux dès maintenant, S'il daigne s'en servir, être son lieutenant ; L'exemple des Romains m'autorise à le faire, CORN. Nicom. II, 3.
72°   Impersonnellement, faire sert à marquer l'état de l'atmosphère. Il fait jour. Il fait froid. Quelle chaleur il a fait tout le jour ! Les chaleurs qu'il a fait l'année dernière. Il a fait du vent. Il a fait un grand coup de vent. Il va faire de l'orage. Il a fait hier de la pluie. Il faisait doux quand nous sommes sortis. Il fait sec aujourd'hui.
   Selon le temps qu'il fait l'homme doit naviguer, RÉGNIER Sat. VI.
   M. le prince n'avait pas eu lieu de s'imaginer qu'il pût trouver le roi au retour du bain, par un temps aussi froid qu'il faisait, RETZ III, 347.
   Allez doucement, il fait glacé, vous vous rompriez les jambes, VOLT. Moeurs, 128.
   La locution il fait chaud s'explique par il, sujet indéterminé, annonçant le vrai sujet qui est placé plus loin par inversion ; il, c'est-à-dire le chaud, fait, c'est-à-dire règne. C'est pour cela que l'on dit : quelle chaleur il a fait, et non faite.
   Par extension, se dit des diverses conditions des choses. Il fait cher vivre à Paris.
   Qu'il fera dangereux rencontrer sa colère !, CORN. Suite du Ment. III, 2.
   Il doit faire mal sûr recevoir vos serments, TH. CORN. le Galant doublé, v, 2.
   Il ne fait pas bien sûr, à vous le trancher net, D'épouser une fille en dépit qu'elle en ait, MOL. Femm. sav. V, 1.
   Il fait meilleur chez nous, LA FONT. Fabl. IV, 13.
   La peste ! il y ferait bon, méfiant comme vous êtes, BEAUMARCH. Barbier, III, 7.
   Ironiquement. Il fait beau, il ferait beau, c'est-à-dire c'est, ce serait une chose ridicule.
   Il nous ferait beau voir attachés face à face à pousser de beaux sentiments, MOL. Amph. I, 4.
73°   Se faire, v. réfl. Se constituer en un certain état. Se faire avocat. Elle s'est faite religieuse.
   Mais je me fis toujours maître de ma fortune, CORN. Oedipe, v, 4.
   De nos jours, un imposteur s'est dit le Christ en Orient ; tous les Juifs commençaient à s'attrouper autour de lui ; ils s'imaginaient déjà qu'ils allaient devenir les maîtres du monde, quand ils apprirent que leur Christ s'était fait Turc, BOSSUET Hist. II, 9.
   Jésus-Christ, tout saint qu'il était, n'a pas voulu entreprendre de se faire grand, BOURDAL. 10e dim. après la Pentec. Dominic. t. III, p. 208.
   Qui sait que son Dieu l'a sauvé en se faisant petit, et qui prétend se sauver en se faisant grand, BOURDAL. ib. p. 209.
   Puisque Votre Majesté, qui s'est faite homme, continue toujours à m'honorer de ses lettres, j'ose la supplier de me dire comment elle partage sa journée, VOLT. Lett. roi de Prusse, 18 juin 1740.
   Se faire belle, se dit d'une femme qui se pare.
   Se faire de fête, s'inviter soi-même.
   Il s'offre, il se fait de fête, il faut l'admettre, LA BRUY. IX..
74°   Se produire réciproquement.
   Quand on a commencé à prendre ce train [une éducation vigoureuse et toute dévouée à la patrie], les grands hommes se font les uns les autres, BOSSUET Hist. III, 6.
75°   Se faire, être son propre instituteur, son propre maître.
   Son talent n'est pas ordinaire pour une femme, et pour une femme qui s'est faite toute seule, DIDEROT Salon de 1769, Oeuv. t. XV, p. 35, dans POUGENS.
76°   Se développer, en parlant des personnes. C'est un jeune homme qui se fera.
   La fille crût, se fit ; on pouvait déjà voir Hausser et baisser son mouchoir, LA FONT. Coupe..
   Mlle de Marcay se fait et danse des mieux, MAINTENON Lett. à d'Aubigné, 25 juin 1684.
   Se bonifier, en parlant des choses. Ce vin, ce fromage s'est fait.
77°   Se faire à, s'accoutumer, s'habituer.
   Et doutant s'ils voudront se faire à l'esclavage, CORN. Sertor. III, 2.
   Qui sait faire sa cour se fait aux moeurs des princes, CORN. Othon, III, 3.
   Eh bien tant pis ! je fronde Ce mariage avec cet homme-là ; Mais, s'il est fait, le public s'y fera, VOLT. Prude, III, 6.
   Il [le cheval] voit le péril et l'affronte ; il se fait au bruit des armes, il le cherche et s'anime de la même ardeur, BUFF. Quadrup. t. I, p. 9, dans POUGENS.
   Il se dit aussi des yeux, de l'imagination, etc.
   Rien ne nous surprendra de voir la même chose Où nos yeux se sont faits quinze ans sous Théodose, CORN. Pulchér. II, 2.
   L'imagination se fait à cette grande peine [un supplice], MONTESQ. Espr. VI, 11.
   S'abaisser, condescendre.
   Passe encor de le voir [Jupiter], de ce sublime étage Dans celui des hommes venir, Prendre tous les transports que leur coeur peut fournir, Et se faire à leur badinage, MOL. Amph. Prol..
78°   Se faire, suivi d'un adjectif, devenir. Ces arbres commencent à se faire beaux. Nous nous faisons vieux sans nous en apercevoir.
79°   Se faire, suivi d'un infinitif, rend le verbe causatif en même temps que réfléchi (bien entendu, dans ces constructions le participe fait est toujours invariable : Elle s'est fait connaître, ils se sont fait connaître).
   Faites-vous contenter par ce couple céleste, LA FONT. Fabl. I, 14.
   Si le mari ne se fût fait connaître, Elle en allait enfiler beaucoup plus, LA FONT. Mari conf..
   La douceur de sa voix a voulu se faire paraître dans un air tout charmant qu'elle a daigné chanter, MOL. Princ. d'Él. III, 2.
   L'histoire, de quelque manière qu'elle soit écrite, a le privilége de se faire lire, D'OLIVET Hist. Acad. t. II, p. 2.
   La marte ne s'approche jamais des maisons, et elle diffère encore de la fouine par la manière dont elle se fait chasser, BUFF. Quadrup. t. II, p. 243, dans POUGENS.
   Une effrayante voix s'est fait alors entendre, VOLT. Oedipe, I, 3.
80°   Familièrement. Se laisser faire, ne pas se défendre, ne pas opposer de résistance. Cette jeune fille s'est laissé marier à un homme qui ne lui convenait pas. Nous laisserons-nous faire ainsi ?
81°   Se faire, être fait.
   La mauvaise subtilité est moins dangereuse quand on raconte des choses faites que quand on délibère des choses à faire ; ici, pour ne rien dire de pis, elle est cause que les choses ne se font point, BALZ. De la cour, 3e disc..
   Notre connaissance s'est faite à l'armée, MOL. Précieuses, 12.
   Et vos noces se feront dès ce soir ?, MOL. Mar. f. 12.
   On veut que tout se fasse par moi ; et cela n'est point, MAINTENON Lett. à Dangeau, t. VII, p. 76, dans POUGENS.
   Leurs habits, leurs tentes, leurs cordages, leurs tapis, tout se fait avec la laine de leurs brebis, le poil de leurs chameaux et de leurs chèvres, BUFF. Suppl. à l'hist. nat. Oeuv. t. XI, p. 265, dans POUGENS.
   La nuit se fait, la nuit commence. Arriver à l'heure où la nuit se fait.
   Terme de marine. Le jusant se fait, il prend de la force. La brise se fait, elle devient plus vive. Le vent s'est fait depuis le lever du soleil, il s'est levé ou il a pris de la consistance depuis le lever du soleil.
82°   Impersonnellement. Être, arriver. Comment se fait-il que vous ne soyez pas venu ? Il s'est fait des fentes dans cette muraille. Il se fit un grand silence. Il s'est fait des choses qu'on ne sait pas.
   Quoi ! se pourrait-il faire Qu'à l'oeuvre de ses mains Rome devînt contraire ?, CORN. Nicom. IV, 5.
   Il est visible qu'en tuant le monde de cette sorte il se ferait un trop grand nombre de meurtres, PASC. Prov. 7.
   Ce qui paraît le plus certain c'est qu'il se faisait des assemblées secrètes dans sa maison du Capitole, VERTOT Révol. rom. VII, p. 224.
On dit de même il se fait tard, il se fait nuit, le jour commence à manquer, la nuit commence à venir.
PROVERBES
   Ce qui est fait n'est pas à faire, c'est-à-dire quand on peut faire une chose, il ne faut pas la différer.
   Il a fait comme Robin fit à la danse, du mieux qu'il put.
   Il est comme le bonnetier, il n'en fait qu'à sa tête, c'est-à-dire il suit toujours sa volonté, sa fantaisie (on joue ici sur ce que le bonnetier fait des bonnets à sa tête).
   L'occasion fait le larron, c'est-à-dire l'occasion fait qu'on cède à des tentations auxquelles autrement on n'aurait pas cédé.
   On ne saurait faire d'une buse un épervier, on ne peut transformer un sot en habile homme.
   Les riches font leur paradis en ce monde.
   Comme il te fera, fais-lui, c'est-à-dire rends-lui la pareille.
   C'est à moi à faire, et à vous à vous taire.
   Laissons-les dire pourvu qu'ils nous laissent faire.
   Faire et dire sont deux, c'est-à-dire il y a loin entre la parole et l'effet.
   Qui bien fera bien trouvera.
   On ne peut faire qu'en faisant, c'est-à-dire ce n'est qu'en pratiquant les choses qu'on y devient habile.
   Qui a fait l'une a fait l'autre, se dit de deux personnes, de deux choses qui se ressemblent extrêmement.
   Qui fait un pot fait bien un poêle, c'est-à-dire qui peut le plus peut le moins.
   Faire de cent sols quatre livres et de quatre livres rien, se dit d'un prodigue qui mange son avoir.
   Maison faite et femme à faire, c'est-à-dire il faut acheter une maison toute construite et épouser une femme jeune dont on puisse former le caractère.
   Quand les mots sont dits, l'eau bénite est faite, c'est-à-dire il faut convenir de toutes les clauses d'un marché avant que de le conclure.
   Paris ne s'est pas fait en un jour, ou tout en un jour, c'est-à-dire il faut donner du temps pour faire les grandes affaires.
   Qui se fait brebis, le loup le mange, c'est-à-dire il ne faut pas être trop débonnaire.
   Le bon oiseau se fait de lui-même, c'est-à-dire un esprit intelligent s'instruit, se développe par lui-même.
   Fais ce que dois, advienne que pourra.
   Tout se fait avec le temps, c'est-à-dire avec de la patience on vient à bout des choses.
   1. Quand faire est suivi d'un infinitif, ce verbe doit être précédé des pronoms lui, leur, et non des pronoms le, la, les, lorsque l'infinitif a un régime direct : On lui fit obtenir un emploi ; on lui fit faire cette démarche ; et il veut avant lui les pronoms le, la, les, toutes les fois que le verbe qui est à l'infinitif n'a point après lui de régime direct : On le fit renoncer à ses prétentions ; on le fit consentir à cette demande.
   2. C'est la règle.
   Pourtant Corneille a dit : Sors de mon coeur, nature, ou fais qu'ils [mes fils] m'obéissent ; Fais-les servir ma haine ou consens qu'ils périssent, VERTOT Rodog. IV, 7.
La règle voudrait : fais-leur servir.... Cette construction est un archaïsme, et pourrait s'employer en vers ou dans le style élevé. Il ne faut pas confondre ces cas avec ceux où le pronom est régime direct du verbe à l'infinitif : Je l'ai fait nommer, c'est-à-dire j'ai fait nommer cet homme.
   3. Quand, au lieu d'un pronom placé avant, il y a un substantif placé après, là où l'on met lui, leur, on met à ; et là où l'on met le, la, les, on ne met point à : Je ferai faire la démarche à cet homme ; je ferai renoncer cet homme à ses prétentions. Dans le premier cas, homme est régime indirect de faire faire ; dans le second, régime direct de faire renoncer.
   4. Je le fais parler, c'est-à-dire je fais qu'il parle, ou je lui attribue des paroles. Je lui fais parler, c'est-à-dire je fais qu'on lui parle. Je le fais répondre, c'est-à-dire je fais qu'il réponde, ou je lui attribue une réponse. Je lui fais répondre, je fais qu'on lui réponde. Je fais faire un habit à mon fils, je commande qu'on lui fasse un habit. Je fais faire un habit par mon tailleur, je charge mon tailleur de faire un habit.
   5. Dans cet emploi, quand c'est un nom, non un pronom, on met toujours à : Homère fait dire à Ulysse.... il met dans la bouche d'Ulysse.... mais le sens doit être déterminé d'ailleurs ; car cela peut signifier : il recommande qu'on dise à Ulysse....
   6. Il faut bien prendre garde à la clarté ; car des amphibologies naissent facilement. Fais-lui tenir parole, peut signifier également fais qu'il tienne parole, ou fais qu'on lui tienne parole. Faites-lui faire un lit, peut signifier également ayez soin qu'on lui fasse un lit, et chargez-le de faire un lit. Dans ce vers de Racine : Veille auprès de Pyrrhus, fais-lui garder sa foi, Andr. IV, 5 ; sa foi détermine le sens, c'est-à-dire fais qu'il garde sa foi ; mais, s'il y avait la foi, le sens serait douteux.
   7. Avec le pronom relatif, l'amphibologie est la même. L'homme à qui j'ai fait garder la terre, peut signifier l'homme par qui j'ai fait garder la terre, et l'homme pour qui j'ai fait garder. Il faut donc veiller attentivement au sens.
   8. Il faut distinguer lui faire apprendre et le faire apprendre. On dit : lui faire apprendre, lorsque apprendre a un régime direct : Je lui fais apprendre le latin. On dit le faire apprendre, lorsque apprendre n'a pas de régime direct, comme dans ces vers de la Fontaine : Mes parents, reprit-il, ne m'ont point fait instruire ; Ils sont pauvres et n'ont qu'un trou pour tout avoir ; Ceux du loup, gros messieurs, l'ont fait apprendre à lire, Fabl. XII, 17.
   9. À l'impératif, les pronoms se placent entre faire et le verbe. Faites-le bien garder. Faites-vous aimer.
   10. On trouve dans la Rose (voy. l'historique) : L'avaient moult fete jaunir. Ici le participe est accordé ; mais ce n'est point un archaïsme, c'est une faute.
   11. Employé de la sorte, faire n'a point de passif. On ne dit pas : il fut fait peindre. Il y a déjà longtemps que l'Académie a condamné il fut fait mourir : La plupart n'ont pas été contents de il fut fait mourir ; ils veulent qu'on dise : on le fit mourir, ou on le fit exécuter, Observ. sur Vaugelas, p. 275, dans POUGENS.
   12. Il y a divergence sur la manière d'interpréter le rôle syntactique des pronoms lui, leur et le, la, les avec faire suivi d'un infinitif. Faut-il analyser : Je lui fais faire une démarche, par : je fais à lui ceci, faire une démarche, ou par : je fais faire une démarche par lui ? Faut-il analyser : Je le fais rire, par : je fais le, lui rire, ou par : je fais rire le, lui ? L'ancien usage (Xe s. La faire diavle servir), et l'anglais, qui sans doute provient de cet ancien usage français (he made him laugh, il le fit rire), montrent que c'est la première analyse qui est la bonne. L'emploi du régime indirect des pronoms au cas particulier cité dans la remarque première est une exception à la règle ancienne.
   13. Les écrivains ont hésité entre avoir affaire à, et avoir à faire à.
   Les Suédois crurent avoir à faire à 40 000 combattants, VOLT. Russie, I, 17.
Aujourd'hui, dans ce sens, on ne se sert que de avoir affaire.
   14. L'ellipse du verbe faire veut qu'un participe qui suit reste invariable. Il m'a fait toutes les avanies qu'il a voulu. Il m'a fait tous les maux qu'il a pu.
   IXe s.
   In o quid [pourvu que] il mi altresi fazet [me fasse semblablement], Serment.
   Xe s.
   [Ils] voldrent [voulurent] la faire diavle servir, Eulalie.
   Fisient [ils faisaient], Fragm. de Valenciennes, p. 467.
   Ne fait, ib..
   U ne fereiet [ou ne ferait], ib. p. 468.
   Quant [un lierre] umbre li fesist, ib..
   E sis [si les] penteiet [repentait] de cel mel [mal] que fait habebant, ib..
   Chi [ceux qui] sil [si le] fennt [font] cum faire lo deent, et cum cil lo fisient dont ore aveist odit [avez ouï], ib..
   faciest [que vous fassiez] cest [lisez ceste] predictam penitentiam, ib..
   Faites vost almosnes, ib..
   XIe s.
   [Ils] doinent lur terme de lur adaisement ; Quant vint al fare, dunc le funt gentement, St Alexis, X.
   De quel forfait que home out fait en cel tens, Lois de Guill. 1.
   Cinquante chars qu'en [on] ferat charier, Chans. de Rol. III.
   Li emperere se fait et baud et liez, ib. VIII.
   Enz en vos bains que pour vous Deus i [à Aix-la-Chapelle] fist, ib. x.
   Faites la guerre com vous l'avez emprise, ib. XIV.
   Pecchet fereit qui donc lui fesist plus, ib. XVI.
   Qui toute gent velt [veut] faire recreant, ib. XXIX.
   Vostre message [nous] fesismes à Charlon, ib. XXXI.
   Livrez le mei, j'en ferai la justice, ib. XXXVII.
   Miex en vaut l'orl [le bord] que ne font cinq cenz livres, ib. XXXVIII.
   Qui porreit faire que Rolansy fust morz, ib. XLIV.
   Et vingt hostages ; faites les bien garder, ib. LIII.
   Mout [il] se fait fier de ses armes porter, ib. LXX.
   Respont rolanz : Jà fereie que folz, ib. LXXXI.
   Li reis Marsile de nous a fait marché, ib. LXXXVIII.
   Cil qui là sont ne font mie à blasmer, ib. XC.
   Ce dist Rolanz : compains, que faites vous ?, ib. CIV.
   Quant jel vous dis, [vous] n'en feïstes nient, ib. CXVII.
   Mieux vaut mesure que ne fait estoutie [folie], ib..
   Dist l'archevesque : assez le faites bien [le bien faire, c'est se bien comporter, ici il s'agit de combat], ib. CXXXIX.
   Li reis creit Deu, faire velt son service, ib. CCLXVIII.
   Dist l'un à l'aultre : bien fait à remaneir [il est bon de rester], ib. CCLXXVII.
   Deus face hui entre nous deus le dreit, ib. CCLXXXV.
   XIIe s.
   Maintes feiz as od mei jeü ; Unkes jamès ceo ne me fis, Roman de Rou, v. 5789.
   Si fait conseil [un tel conseil] donner, Ronc. p. 19.
   Faites le lire [un bref], ib. p. 24.
   Qui mieux fera, assez dire l'orez [ouïrez], ib. p. 41.
   Dist Berengers : mes armes m'aportez ; Et on si fait par vives poestez, ib. p. 53.
   Escu ne broigne [cuirasse] ne lui fist garison [défense], ib. p. 74.
   Bataille aurons, font-il [disent-ils], car esgardez, ib. p. 96.
   Sont li lit fait où nous devons coucher, ib. p. 98.
   Que fait [comment se porte] mes sires ? est-il sains et haitiés ?, ib. p. 159.
   [Ils m'ont laissé] Si com la beste fait [laisse] au bois son faon, ib. p. 170.
   Miex [je] veil morir que [je] fasse tel vilté, ib. p. 35.
   Car ensi doit-on faire de traïtor felon, ib. p. 200.
   Nouvele amor où j'ai mis mon penser Me fait chanter de la plus debonaire, Couci, II.
   Et mes chansons [je] fais por vous solement, ib. VII.
   Que jà à moi [vous] ne fetes beau semblant, ib. x.
   Tant [je] fas pour lui [pour elle] greveuse penitance, ib. XI.
   Tant com lui plaist [elle] me peut fere languir, ib..
   Mais ma dame est de si très grant vaillance [prix], Que son ami ne doit fere faillance, ib. XXIV.
   Et maugré tout mon lignage [je] Ne quier ochoison trouver ; D'autre face mariage ; Folz est qui j'en oi [ouis] parler, Dame de Faiel, dans Couci.
   Et au pauvre [la dame] se fait et chiche et morne, QUESNES Romancero, p. 86.
   Et je puis bien faire voire ventance, Que je fais plus pour Dieu que nuls amans, ib. p. 95.
   Onques en leur jouvente [ils] ne firent se mal non, Sax. III.
   Le nez moult tres bien fait, les denz menuz et blanz, ib. v.
   De Jofroi de Paris [ils] firent leur justicier, ib. IV.
   Ce fu à Pentecoste, que il fet bel et cler, ib. XIII.
   Se l'offrande fu riche, ne fait à demander, ib..
   Sire, ce dist dus Naimes, faites faire errament [promptement] Vos chartres et vos briés [brefs] à clerz bien escrivans, ib. XXI.
   Idunkes fu ocis e al coeu [cuisinier] fu livrez ; Li keus manja le cuer ; quant li fu demandez, Fist al seigneur acreire que sans cuer il fust nez, Th. le mart. 31.
   cil qui ad malvaispere, malvaise est s'eritez [son héritage] ; Cil qui ad fieble chef, souvent est flaelez [flagellé]{{}}; Quand li filz fait le pere, <
  • , ib. 128.
  •    Fist li poples à Saül : comment si murrad Jonathas !, Rois, p. 51.
       XIIIe s.
       Nous en parlerons moult volentiers, et le vus ferons asavoir d'ici en huit jors, VILLEH. XIII.
       Et distrent que si faite gent ne devoient avoir droit en terre tenir, VILLEH. CXV.
       Et nous n'avons mie mestier de perdre nos homes, quar trop en avons petit à ce que nos en avons à faire, VILLEH. LXII.
       Sire, que volés-vos que nos faciemes ?, VILLEH. CXLVI.
       Là le fist mout bien Mahius de Valaincourt, car il perdi son cheval, droit à la porte devers Blaquerne, VILLEH. LXXVI.
       Puis en fut la pais si et faite et establie, Berte, II.
       Des journées [marches] qu'il firent, trop ne vous conterai, ib. VII.
       Or vous faites aimer [de] gent letrée et gent laie, ib. VIII.
       À nostre gent françoise [il] fit maint riche present, ib. IX.
       Menestrel s'apareillent pour faire lor mestier, ib. XI.
       À une fenestrele qui ert [était] faite de pierre, ib. XII.
       Tant [nous] avons fait pour vous [que] nuls nel porroit descrire, ib. XIV.
       Li rois fist de la serve toute sa volonté [jouit d'elle], ib. XV.
       [Elle] Mout faisoit la dolente et mout sembloit irée, ib. XVI.
       Cil jour [il] fit mout lait temps et de froide maniere, ib. XX.
       Se tu lui fais nul mal, par l'apostre saint Pierre...., ib. XX.
       Quant pour faire tel meurtre [nous] venimes ceste part [ici], ib. XXII.
       Jusqu'à tant que noir fist [qu'il fît noir], [elle] ne s'osa redresser, ib. XXXVIII.
       [Elle] Cuida que il fust jour, pour ce qu'il faisoit clair, ib. XLIII.
       Car me monstrez la voie, si aurez fait aumosne, ib. XLVI.
       Et symons fait le feu, n'ot pas le cuer vilain, ib. XLIX.
       L'amour [l'amitié] que m'avez faite vous soit de Dieu rendue, ib. LII.
       Constance, dist Symons, faites lui faire un lit, Berte, LIII.
       À tous se fit amer [aimer] Berte, tant [je] vous en di, ib. LIX.
       Onc puisqu'ele [elles] lor dame voudrent [voulurent] faire mourir, ib. LXIII.
       Bon se feroit garder [il ferait bon se garder], qui pourroit, de mesfaire, ib. LXIX.
       [Ma fille] Se fait ainsi haïr [de] gent voisine et lointaine, ib. LXXIV.
       C'est que ma fille face la malade tous dis, ib. LXXV.
       Mere, ce dist la serve, vostre conseil [nous] ferons, ib. LXXVII.
       Je tant feroie à vous [je vous solliciterais tant].... Que d'un de vos enfants [je] lui feroie present, ib. LXXXIII.
       Dame, que fait mes peres, que Diex puist benéïr ? - Fille, il le faisoit bien quant de lui [je] dus partir, ib. LXXXVII.
       Tais-toi, vieille, fait-ele, [je] n'en ferai rien pour ti [toi], ib. LXXXIX.
       Que ce seroit bien fait que la vieille en arsist [on brûlât], ib. XCI.
       Dit [il] lui a qu'au retour riche homme [il] le fera, ib. CXXII.
       Blanchefleurs s'est dressée, aussi fit li rois Flores, ib. CXXVIII.
       Bien est drois [que] nous fassions toutes vos volentés, ib. CXXXII.
       Por ce, [il] fait bon bien faire, chascuns en doit penser Qu'en la fin pert [paraît] le bien..., ib. CXXXIX.
       Quar il estoit sor toute rien Et frans et dous et debonere ; Quanques chascuns en vousist fere, En peüst fere entor ostel [à la maison, dans la paix] ; Mais aus armes [à la guerre]...., Lai de l'Ombre.
       Il le [l'anneau] vous convient à reprendre. -Non fetsi fet, là n'a que dire, ib..
       Perroz qui son engin et s'art Mist en vers fere de Renart Et d'Ysengrin son chier compere, Ren. 9650.
       Par une broce en un pendant, Maugré trestoz mes anemis, Fis-je tant que el bois me mis, ib. 8726.
       Mais Renart n'en fait que sourire, Que moult a entre faire et dire, ib. 832.
       [Bien est fou] Qui cuide que tel femme l'aime, Por ce que son ami le claime, Et qu'el lui rit et li fait feste, la Rose, 4587.
       Car si cum il m'iert lors avis, Ne feïst en nul paradis Si bon estre, cum il faisoit Ou [au] vergier qui tant me plaisoit, ib. 644.
       Sans faille ainsinc est-il des hommes, Se nous, por plus biaus estre, fomes [faisons] Les chapelés et les cointises Sor les biautés que Diex a mises En nous..., ib. 9102.
       Si n'i feïst riens avarice Ne de paleur, ne de megrece, Car li soucis et la destrece, Et la pesance et les ennuis Qu'el soffroit de jors et de nuis, L'avoient moult fete jaunir, Et megre et pale devenir, ib. 296.
       Car d'une source vient si haute L'eve, qu'el ne puet faire faute, ib. 20690.
       Et li escommeniement font à douter [sont redoutables], comment qu'il soient geté, soit à tort soit à droit, BEAUMANOIR 58.
       Et en ce fesant, pourra estre li contens [querelle] de la vile apaisiés, BEAUMANOIR L, 10.
       ....Et li sires est tenus au fere, BEAUMANOIR XII, 12.
       Je vos requier que vos en faciés, comme de murdrier [meurtrier], BEAUMANOIR LXI, 3.
       Tix [tels] dons ne tix promesses ne font pas à tenir, ID. VI, 24.
       Qui se veut aidier des resons qui ne font fors que le plet delaier, il les doit dire avant que celes qui poent fere la querele perir, BEAUMANOIR VII, 5.
       Et li fera entendant que ele li fera avoir par force de paroles ou par herbes ou par autres fais qui sont malvais et vilain à ramentevoir, BEAUMANOIR XI, 26.
       La quinte maniere de quemins [chemins] qui furent fet, ce furent li cemin que Julien Cesar fit fere, BEAUMANOIR XXV, 2.
       Assez pueent [peuvent] chanter et lire ; Mais mult a entre fere et dire ; C'est la nature, RUTEB. 79.
       Chascuns [chanoine] a son hostel, son leu et sa mainie, Et s'en i a de tex qui ont grant seignorie, Qui poi font [font peu] pour amis et assés pour amie, RUTEB. 239.
       Et le siecles est ores tel que moult y a de ciaus [ceux] qui feroient volentiers coment il fussent riches, tot fust ce à tort, Ass. de Jér. I, 248.
       Sire, je croi que vous feriés bien se vous demouriez à ce poncel garder, JOINV. 227.
       Je leur fiz tailler cotes et hargaus [surcots] de vert, et les menai devant le roy, JOINV. 261.
       Et pour ce ne font force [difficulté] li Assacis d'eulz faire tuer, quant leur seigneur leur commande, JOINV. 260.
       Je leur fis dire à [par] mon sarrazin, que il me sembloit que ce n'estoit pas bien fait, JOINV. 241.
       XIVe s.
       Quant un homme nuist et fait peine hors la loy à aucun qui ne li contrarioit pas ou nuisoit.... il fait injuste, ORESME Eth. 167.
       Plus que faire n'avons de ce liepart felon ; Voist [qu'il aille] faire ailleurs son ni, plus de lui ne voulons, Guesclin. 21192.
       Ce qui est fait est fait, il ne peut autrement, Tous nous convient mourir ; si ne savons comment ; Pour ce fait-il bon vivre en estant durement, ib. 22581.
       Si fu dit, il fu fait assez hastivement, ib. 16840.
       Nos termes ne font mencion De la beauté qui est es chiens Ou es oiseaulx ; ce n'y fait rien, Modus, f° CX.
       L'on li disoit : " Vilains, et que fais-tu cest fais [combien vends-tu ce faix] ? " Par le ciel Dieu cinq sols et sept deniers le fais [je le fais], Girart de Ross. v. 2241.
       XVe s.
       Il fait bon ouvrer par engin, quant on ne peut avant aller par force, FROISS. I, I, 151.
       Et dirent l'un à l'autre : Allons nous armer, nous chevaucherons tantost devant Bergerac.... Il n'y eut plus fait ni plus dit ; tous furent armés, et les chevaux ensellés et tous montés, FROISS. I, I, 217.
       Il fit le roi d'Angleterre escrire au saint pere, FROISS. I, I, 11.
       Ce vous fais-je ferme et vrai [ces renseignements sont certains], car je me embattis si près d'eux que je fus pris et mené en leur ost...., FROISS. I, I, 40.
       Mais petit y faisoient, car l'ost des Anglois estoit si suffisamment gardé que les Escoçois n'y pouvoient entrer...., FROISS. I, I, 58.
       Celui [Artevelle] estoit entré en si grand fortune et en si grand grace à tous les Flamands que c'estoit tout fait et bien fait quant qu'il vouloit deviser et commander par tout Flandre, de l'un des costés jusques à l'autre, FROISS. I, I, 65.
       .... Madame Philippe de Hainaut, roine d'angleterre, qui liement et doucement le reçut [mon livre] de moi et m'en fit grand profit, FROISS. Prol..
       Robert Bruce, roi d'Escosse, qui avoit tant et si souvent donné à faire au bon roi Edouard dessus dit, qu'on tenoit pour moult preux, reconquit toute Escosse, FROISS. I, I, 2.
       Monseigneur, je suis jeune et encore à faire ; si crois que Dieu m'ait pourvu de cette emprise pour mon avancement, FROISS. I, I, 17.
       Et à ce temps là ils [les Escots] aimoient et prisoient assez peu les Anglois, et encore font ils à present, FROISS. I, I, 34.
       Et s'allierent par certaines convenances, que, si l'un des trois pays avoit à faire contre qui que ce fust, les deux autres le devoient aider, FROISS. I, I, 125.
       Et rien n'y avoient fait, combien qu'ils y eussent grands frais mis et dependus, FROISS. I, I, 145.
       En ce temps là que le duc de Bourgogne fit son armée en Picardie, FROISS. II, II, 1.
       Sur le chemin que nous fesismes ensemble, FROISS. II, III, 12.
       À quoi faire montrent ils maintenant leurs estats ?, FROISS. II, II, 205.
       Mais, seigneur, nous vous disons bien que, au faire le serment, toujours en nos coeurs nous avons reservé nos fois devers notre naturel seigneur le roi d'Angleterre, FROISS. II, II, 8.
       Ceux qui ens es villages estoient, sonnoient les cloches à herle [à volée], et montroient bien que le pays avoit à faire [était en danger], FROISS. II, II, 184.
       Il s'acointa d'un riche homme de Montpellier lequel avoit aussi à faire à Paris pour ses besognes, FROISS. II, III, 7.
       Et s'il eust fait un temps pluvieux, ceux de l'ost eussent eu fort à faire, FROISS. II, II, 232.
       Et vit bien le chevalier anglois que il n'avoit que faire de plus avant entrer en Flandre, FROISS. II, II, 203.
       Et y firent d'armes ce qu'ils purent, et se combattirent moult vaillamment ; mais ils ne pouvoient pas tout faire [le sire d'Enghien et sa suite tombés dans l'embûche des Gantois], FROISS. II, II, 123.
       On leur [aux Anglois] donnoit tant à faire, que on ne savoit auquel lez [côté] entendre, FROISS. II, II, 215.
       Vous ferez tant que vous me perdrez, FROISS. II, III, 22.
       Il fait tout de sa teste, car il est naturellement sage, FROISS. II, III, 61.
       Si se passa le dimanche ainsi tout le jour sans rien faire, FROISS. II, II, 215.
       Ils mirent la greigneur partie de leurs gens d'armes et archers à l'endroit [de la ville assiégée] où il faisoit le plus foible, FROISS. I, I, 302.
       Ha ! dit le comte, c'est fait ! n'aura jamais paix en Flandre tant que Jean Lyon vive, FROISS. II, II, 56.
       Et [le roi d'Angleterre] eut de la main ce jour le plus à faire à messire Eustache de Ribeumont, et fut le roi abattu à genoux par deux fois, du dessus dit messire Eustache de Ribeumont, FROISS. I, I, 328.
       Messire Pierre de Craon qui se veoit en ce danger et avoit à faire à forte partie, FROISS. III, IV, 6.
       Ceux qui sont plus tenus de servir se font plus chier achapter, AL. CHARTIER Quadriloge invectif..
       Chascun dit bien : oblie, oblie ; Mais il ne le fait pas qui veult, AL. CHARTIER Le débat d'un reveille matin..
       Qui sires est vueille ci garde prendre ; Pour ce furent les rois et princes fais, E. DESCH. Gouvernement des rois..
       Faictes de lui ainsi que vous vouldrez ; Content me tiens de ce que vous ferez, CH. D'ORL. 1.
       Mais [les Parisiens] feirent diligence de luy [au duc de Bourgogne] resister en toutes manieres, et s'en alla honteusement sans rien faire, JUVÉNAL DES URSINS Charles VI, 1413.
       ....Et ils achetoient iceux vivres ce que on leur faisoit [mettait à prix], par especial pain et vin, JEAN DE TROYES Chron. 1465.
       Car [ils] n'avoient mie à faire à enfant, Boucic. III, 2.
       J'aime mieux, dit-il [Anaxagoras], que je me soye fait [cultivé] que si j'eusse fait mes possessions, JEAN DE TROYES IV, 6.
       Mais ils en firent comme hommes et non point comme anges [en distribuant après la bataille les récompenses et les punitions un peu à l'aventure], COMM. I, 4.
       Ou le bailleroient à son compaignon [le connestable prisonnier] pour en faire à son plaisir, COMM. III, 11.
       Quelquefois peu d'argent falt grant service, COMM. VII, 5.
       Voyant la ligue si approchée, ne voulut plus faire de l'ignorant, COMM. VII, 15.
       Pourroit sembler aux lecteurs que je disse toutes ces choses pour.... mais par ma foy, non fay ; ains le dy seulement pour...., COMM. VII, 11.
       Or voyant le roy que là ne povoit si tost avoir fait, se delibera de se venir mettre dedans Paris, COMM. I, 2.
       Et y faisoit très beau veoir son ost pour ceulx qui estoient encore derriere, COMM. I, 6.
       Il [Louis XI] congnoissoit toutes gens d'autorité et de valleur qui estoient en Angleterre, en Espaigne.... comme il faisoit ses subjectz, COMM. I, 10.
       Et a toujours bien semblé aux Normans et fait encores que...., COMM. I, 13.
       Et après qu'il eust esté ung an en prison ou plus, il fist le bon plaisir du roy, dont il fist que saige, COMM. V, 15.
       N'ayez plus d'esperance en ce sainct homme ni en autre chose, car seurement il est fait de vous [paroles des commissaires ecclésiastiques à Louis XI mourant], COMM. VI, 12.
       Vous savez bien où est le grand jardin de ceans, ne faites pas [n'est-ce pas] ?, LOUIS XI Nouv. XLVI.
       Le lieu n'est grain honneste, il y fait trop puant, LOUIS XI ib. LXXXVIII.
       Elle qui estoit faite [fûtée] et pourvue de bourdes, lui dit...., LOUIS XI ib. LXXXVIII.
       XVIe s.
       L'un brusle et ard, l'autre est transi ; Qu'ai-je que faire d'estre ainsi ?, MAROT I, 212.
       Vautil pas mieux doncques que tu la comptes, Que d'endurer mille peines et hontes ? Certes si fait, MAROT I, 254.
       Doresnavant que tu deviens homme et te fays grand, il te fauldra...., RAB. Pant. II, 8.
       Je meurs, c'est faict de moy, RAB. ib. IV, 19.
       Dessoubs le voile nocturne Tout se fait paisible et coi, DU BELLAY III, 79, recto..
       Il jappoit comme un petit chien, a quoi la chambriere estoit faite, qui lui ouvroit incontinent la porte, DESPER. Contes, LVI.
       Je ne scay que faire de croire que ce le soit [je ne puis croire que c'est lui], DESPER. Cymbal. 77.
       Nous ne faisons que partir de boire, toutefoys...., DESPER. ib. 79.
       Il est pour faire un present [digne d'être offert en présent] au roy, DESPER. ib. 141.
       À ce que m'ayant perdu, ce qu'ils ont à faire bientost, ils y puissent retrouver aucuns traicts de mes conditions et humeurs, MONT. Au lect. p. XI.
       Donner loy au pis faire, MONT. I, 25.
       Faictes place aux aultres, MONT. I, 86.
       Nous n'en avons que faire, MONT. I, 97.
       Les sauvages d'Escosse n'ont que faire de la Touraine [ils n'en voudraient pas], MONT. I, 116.
       S'il y a quelque degré d'honneur, mesme au mal faire, MONT. I, 121.
       Se faire fort de veoir...., MONT. I, 123.
       Hommes faicts, MONT. I, 181.
       Se faire le poil et les ongles, MONT. ib..
       Il n'en fault pas faire à deux, MONT. I, 183.
       Caton n'en faisoit que rire, MONT. I, 189.
       Non comme il se faict [comme l'on faict], MONT. I, 183.
       La bonne rhythme ne faict pas le bon poëme, MONT. I, 189.
       C'est une bonne chose que le bien dire, mais non pas aussi bonne qu'on la faict, MONT. I, 193.
       J'estois desja si faict et accoustumé à...., MONT. I, 220.
       Soit qu'il feist soleil ou qu'il pleust, MONT. I, 260.
       Il ne faict que d'en venir, MONT. ib..
       Un esquif qui faict eau, MONT. II, 222.
       C'est à faire aux seuls Spartiates de..., MONT. IV, 67.
       Il faict bien piteux et hazardeux, despendre d'un aultre, MONT. IV, 97.
       Qui le croiroit, s'il ne faisoit que l'ouïr dire et non le veoir ?, LA BOÉTIE 18.
       Ce sont ceux qui, ayant la teste d'eux mesmes bien faite, l'ont encore polie par l'estude et le sçavoir, LA BOÉTIE 43.
       Mais comme on dit, pour fendre le bois, il se fait des coings du bois mesme, LA BOÉTIE 65.
       De ton bien, il s'en feroit d'argent plus de cent fois autant, LA BOÉTIE 117.
       .... Ou bien si toy mesme enseignes tes receveurs et les fais de ta main, LA BOÉTIE 207.
       Si les hommes virent [tournent] la terre et la font [labourent] à bras, LA BOÉTIE 230.
       De chanter rien d'autruy meshuy qu'ay je que faire ? Car de chanter pour moy je n'ai que trop à faire, LA BOÉTIE 504.
       Par l'oisiveté les maladies se font plus frequentes, et les corps deviennent delicats, LANOUE 125.
       On m'asseura que la Bretaigne, qui est des plus grandes, feroit [fournirait] aisement trois cens bons chevaux, LANOUE 233.
       Qu'un gentil-homme aille teindre son espée dans le sang de son ami, avec lequel il n'avoit fait auparavant qu'un lict, qu'une table, et qu'une bourse, LANOUE 247.
       Il commençoit à se faire tard, LANOUE 562.
       Il commença à devenir presumptueux, se devoyant ès fa çons de faire de monarchie superbe et odieuse à chascun, AMYOT Rom. 41.
       Ceulx qui estoient plus faits et plus forts, apportoient du bois : et ceulx qui estoient plus petits et plus foibles, des herbes, AMYOT Lyc. 36.
       C'est bien et devotement fait, de penser que l'on ne doibt toucher aux trespassez, non plus qu'aux choses sacrées, AMYOT Solon, 39.
       Quoy ! tu mors comme une femme, Alcibiades ; ce non fais, respondit il, mais comme un lion, AMYOT Alc. 3.
       Il prit plaisir et feit gloire de se vestir simplement, AMYOT Pélop. 6.
       Et si estoit [la barque] desja si pesante et si remplie de l'eau qu'elle faisoit que...., AMYOT Lucull. 24.
       Lucullus ne faisoit que de se mettre à sommeiller, AMYOT ib. 29.
       Il se met à la voile sans aborder nulle part, sinon où il estoit contrainct à ce faire, pour prendre vivres ou faire eau, AMYOT Pomp. 107.
       Si bien Caton, disoit-il, n'a que faire de Rome, certainement Rome a affaire de Caton, AMYOT Cat. d'Utiq. 44.
       Caton, onques puis ce jour là, ne feit ny ses cheveux, ny sa barbe, AMYOT ib. 68.
       Leur disant que la perte n'estoit pas à l'adventure si grande comme l'on la faisoit, AMYOT ib. 77.
       Sans y avoir esgard, ilz avoient tousjours fait les choses qu'ilz voyoient estre à faire par raison, AMYOT Demosth. 27.
       Ctesiphon l'escrimeur voulut faire [lutter] à coups de pied, et regibber à l'encontre de sa mule, AMYOT Com. refréner la colère, 14.
       Les Abantes sont les premiers qui se sont ainsi faictz tondre, AMYOT Thésée, 5.
       Le peuple ne s'en feit que rire [ne fit que s'en rire], AMYOT Pélop. 56.
       N'avez-vous fait qu'une maîtresse à Paris ?, D'AUB. Faen. II, 10.
       Il se fait donner des cizeaux, commence à s'en faire les ongles, D'AUB. ib. III, 5.
       Ceux-ci, ayant faict 25000 hommes, assiegerent Ulpian, D'AUB. Hist. I, 24.
       Je n'ai que faire à ceux à qui nature a donné le ventre pour delices, l'esprit et le courage pour fardeaux, eux aussi n'ont que faire de moi, D'AUB. ib. II, 489.
       Le patient au lieu d'urine fait du sang, PARÉ VIII, 34.
       Il entra en matiere et monstra que ce decret faisoit pour lui [lui était favorable], SLEIDAN f° 6.
       Les vents appaiseront leurs haleines terribles, La mer se fera douce, RONS. 930.
       Bourguig. fare ; picard, fouère, foaire ; wallon, fér ; provenç. far, fair, faire ; catal. fer ; espagn. hazer ; portug. fazer ; ital. fare, du latin facere. On est incertain pour la provenance de la racine fac. Curtius, Étym. grecques, I, 52, 219, la rattache, non sans vraisemblance, au sanscrit dhâ, faire, poser, qui a donné le grec ; dh sanscrit se change quelquefois en f dans le latin, par exemple dhûma, fumus ; le c serait une lettre euphonique, comme en grec ; enfin l'a bref de facio aurait son parallèle dans l'e bref du grec.
    SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE
    1. FAIRE. Ajoutez :
    65°   Faire à la chose, contribuer à ce qu'une chose soit mieux.
       Il m'a semblé que ces morceaux faisaient à la chose, ne marquaient point d'humeur...., J. J. ROUSS. Lett. à d'Alemb. 26 juin 1754.
    83°   En termes d'argot, se livrer à un genre particulier de vol.
       M. le président : Cette femme faisait les mariages, c'est-à-dire qu'elle suivait les mariages pour faire les porte-monnaie, Gaz. des Trib. 30 déc. 1874, p. 1247, 1re col..
    Ajoutez :
       15. Régnier a dit : Selon le vent qui fait l'homme doit naviguer, Sat. VI. Cet emploi est archaïque et maintenant inusité ; nous dirions qu'il fait ; mais il n'est point incorrect. Dans cet emploi, faire est un verbe neutre ; il, un sujet indéterminé, qui peut très bien être remplacé par le sujet déterminé ; il le pouvait du temps de Régnier ; il ne le peut plus aujourd'hui, de par l'usage. Pourtant une difficulté reste, celle d'expliquer le rôle grammatical du que, dans qu'il fait. Il semble être un régime direct, et cependant il ne l'est pas, puisqu'on dit : la chaleur qu'il a fait, et non qu'il a faite. La locution régulière serait le vent qui il fait, la chaleur qui il a fait, puisque dans il fait beau temps, l'explication grammaticale est : il, c'est-à-dire beau temps, fait, et ici : il, c'est-à-dire, le vent qui, fait ; il, c'est-à-dire, la chaleur qui, a fait. Mais la prononciation n'a pas admis qui il, et, au risque d'un solécisme, a dit qu'il. Ou, si l'on veut, le que est devenu régime direct par fausse analogie, à mesure que le sens clair de faire pour exister devenait obscur et se perdait.
       16. Bossuet a dit ne faire que de, dans le sens de, ne faire que : Ne vous étonnez pas, chrétiens, si je ne fais plus, faible orateur, que de répéter les paroles de la pieuse Palatine, Anne de Gonz. Il faudrait que répéter. Sans doute ces deux locutions ne faire que et ne faire que de sont très voisines, et à l'origine elles ont pu être équivalentes. Mais, depuis que l'usage leur a assigné un sens spécial, leur voisinage même commande qu'on fasse bien attention à ne pas les confondre.
       17. Faire beauté : Le Sage, dans Gil Blas, VII, 13, se moque de cette expression en la mettant dans la bouche de Fabrice, célébrant le gongorisme : " Je veux, par un seul trait, te faire sentir la différence qu'il y a de la gentillesse de notre diction à la platitude de la leur. Ils diraient par exemple, tout uniment : Les intermèdes embellissent une comédie ; et nous, nous disons plus joliment : Les intermèdes font beauté dans une comédie. Remarque bien ce font beauté. En sens-tu tout le brillant, toute la délicatesse, tout le mignon ? "
    ————————
    faire 2.
    (fê-r') s. m.
       L'action, la puissance de faire.
       Dieu donne le vouloir et le faire selon son bon plaisir, FÉN. Exist. I, 65.
       Que je te hais, dit-elle, en embrassant le sire ! Contraste assez plaisant du faire avec le dire, LAMOTTE Fab. V, 20.
       Terme d'art. Manière propre de chaque artiste.
       Les anciens graveurs de la Grèce avaient un faire léger et fin, MACIETE Des pierres gravées, p. 84, dans RICHELET.
       Donnez à Vien la verve de Doyen qui lui manque, donnez à Doyen le faire de Vien qu'il n'a pas, et vous aurez deux grands artistes, DIDEROT Salon de 1767, Oeuvres, t. XIV, p. 319, dans POUGENS..
       Ton général, caractère d'une oeuvre. Ce tableau est d'un beau faire.
       Le faire on est incomparablement plus libre, plus fougueux, plus hardi, plus chaud et plus beau, DIDEROT Salon de 1767, t. XV, p. 61.
       Diderot l'a écrit sans signe du pluriel : Il y a une infinité de faire différents, Peint. en cire, Oeuvres, t. XV, p. 390. Il vaut mieux lui donner ce signe : Des faires différents.
    PROVERBE Il y a loin du dire au faire.
       Faire 1.

    Dictionnaire de la Langue Française d'Émile Littré. . 1872-1877.

    Игры ⚽ Нужна курсовая?

    Regardez d'autres dictionnaires:

    • faire — FAIRE. v.a. Ce Verbe est d une si grande estenduë, que pour en marquer tous les sens, & tous les emplois, il faudroit faire presqu autant d articles, qu il y a de termes dans la Langue, avec lesquels il se joint. On ne s est proposé icy, que de… …   Dictionnaire de l'Académie française

    • faire — Faire, act. acut. Vient de l infinitif Latin Facere, ostant la lettre c. Facere, agere. L Italien syncope, et dit Fare. Faire de l argent à son creancier, Pecunias conquirere ad nomen eradendum ex tabulis creditoris. Faire argent, Conficere… …   Thresor de la langue françoyse

    • Faire — may refer to:*Bristol Renaissance Faire, a U.S. major event in the Midwest *Heloise and the Savoir Faire, a madonna punk outfit based in Brooklyn, New York *How Weird Street Faire, an outdoor street faire and electronic music festival held every… …   Wikipedia

    • Faire un bœuf — ● Faire un bœuf remporter un succès éclatant ; se réunir de façon impromptue entre musiciens de jazz pour constituer un orchestre improvisé …   Encyclopédie Universelle

    • FAIRE — v. a. ( Je fais, tu fais, il fait ; nous faisons, vous faites, ils font. Je faisais. Je fis. J ai fait. Je ferai. Je ferais. Fais. Que je fasse. Que je fisse. Faisant. ) Créer, former, produire, engendrer. Dieu a fait le ciel et la terre. Les… …   Dictionnaire de l'Academie Francaise, 7eme edition (1835)

    • FAIRE — v. tr. Créer, produire. Dieu a fait le ciel et la terre. Dieu a fait l’homme à son image. La nature est admirable dans tout ce qu’elle fait. Fam., Tous les jours que Dieu fait, Chaque jour. Cet enfant fait ses dents, Les dents lui viennent. Il… …   Dictionnaire de l'Academie Francaise, 8eme edition (1935)

    • faire — 1. faire [ fɛr ] v. tr. <conjug. : 60> • Xe; fazet 3e pers. subj. 842; lat. facere. REM. Les formes en fais (faisons, faisions, etc.) se prononcent [ fəz ] I ♦ Réaliser (un objet : qqch. ou qqn). 1 ♦ Réaliser hors de soi (une chose… …   Encyclopédie Universelle

    • faire — v.t. Valoir : Un tableau qui fait trois briques. / Opérer : Faire les porte monnaie (voler). Faire une femme (séduire), etc. Savoir y faire, savoir s y prendre. / Faire médecin, faire des études de médecine. / Parcourir, visiter : Faire l Italie …   Dictionnaire du Français argotique et populaire

    • Faire —  Pour l’article homophone, voir fer. Faire est un verbe de la langue française. Il constitue un élément essentiel de la construction de la langue française par sa forte polysémie. « On peut en effet considérer le verbe faire comme… …   Wikipédia en Français

    • faire — vt. , fabriquer, effectuer ; former ; procéder à, agir ; préparer (la soupe) ; convenir, être approprié ; suppléer ; faire devenir, rendre (+ adj.) ; créer, construire ; terminer, achever. vi. , mûrir, s affiner, se faire, (ep. d un fromage) : fâ …   Dictionnaire Français-Savoyard

    Share the article and excerpts

    Direct link
    Do a right-click on the link above
    and select “Copy Link”