frein

frein
frein 1.
(frin ; l'n ne se lie pas : un frin argenté ; au pluriel, l's se lie : des frin-z' argentés) s. m.
   Autre nom du mors, partie de la bride qu'on passe dans la bouche du cheval pour le gouverner.
   ....Les chevaux, que leur sang effarouche, Bouleversent leur charge, et n'ont ni frein ni bouche, CORN. Les vict. du roi en 1672.
   Ils ne connaissent plus ni le frein ni la voix, RAC. Phèdre, v, 6.
   Ses coursiers n'obéissent plus au frein, FÉN. Tél. XXIV.
   Fig.
   Il est vrai qu'il [le diable] a ses forces entières ; mais celui qui les lui a laissées pour son supplice, lui a mis un frein dans les mâchoires, et ne lui lâche la bride qu'autant qu'il lui plaît, BOSSUET 2e sermon, démons, 3.
   Celui qui met un frein à la fureur des flots, RAC. Athal. I, 1.
   Il mord en frémissant le frein de l'esclavage, VOLT. Alz. I, 1.
   Ronger son frein, se dit du cheval qui, forcé au repos, mâche le frein qu'il a dans la bouche.
   Le superbe coursier que Didon devait monter rongeait son frein à l'attendre, LE P. CATROU dans DESFONTAINES.
   Fig. Ronger son frein, réprimer le dépit qu'on éprouve.
   Le marquis d'Harcourt rongeait son frein de n'avoir pas eu la liberté de traiter avec la reine pour l'amirauté, SAINT-SIMON 81, 43.
   Ronger son frein, signifie aussi être condamné à l'ennui.
   La plupart aux grands airs élèvent leurs aînées, Tandis qu'en un couvent, lieu pour elles malsain, Les cadettes nonnains sont à ronger leur frein, HAUTEROCHE Bourg. de qualité, III, 4.
   Prendre le frein aux dents, s'emporter, en parlant du cheval ; locution venant de ce que, le frein exerçant son influence sur le fond de la bouche et la jonction des lèvres, le cheval y échappe en rejetant le frein en avant et en le tenant dans les dents. On dit plutôt aujourd'hui prendre le mors aux dents.
   Fig. Prendre le frein aux dents, se livrer avec emportement à quelque chose, n'être plus retenu.
   Fig. Ce qui retient sous l'autorité, dans les bornes du devoir, de la raison.
   Les nouvelles villes étaient un frein à qui voudrait remuer, VAUGEL. Q. C. l. X, dans RICHELET.
   C'est [la confession] un frein merveilleux pour arrêter notre coeur, et pour réprimer ses désirs criminels, BOURDAL. 13e dim. après la Pentec. Dominic. t. III, p. 674.
   Mais de combattre en elle et dompter ses faiblesses.... Mettre un frein à son luxe, à son ambition, BOILEAU Sat. X..
   Quel frein pourrait d'un peuple arrêter la licence ?, RAC. Iphig. IV, 4.
   Digne emploi d'un ministre ennemi des flatteurs, Choisi pour mettre un frein à ses jeunes ardeurs, RAC. Brit. III, 3.
   Je sais combien crédule en sa dévotion, Le peuple suit le frein de la religion, RAC. Bajaz. I, 2.
   Qu'un roi n'a d'autre frein que sa volonté même, RAC. Athal. IV, 3.
   Ils ne mettent plus de frein à leurs passions, FÉN. Tél. XXII.
   Ils ne connaissent plus d'autre frein que leur volonté, MASS. Pet. carême, Tent..
   Nasica, dans cette vue, voulait lui laisser [à Rome] la crainte de Carthage comme un frein pour modérer et réprimer son audace, ROLLIN Hist. anc. Oeuv. t. I, p. 524, dans POUGENS.
   En d'autres temps mon courage tranquille Au frein de vos leçons serait souple et docile, VOLT. Mérope, V, 3.
   La crainte d'être déposé est un plus grand frein pour les empereurs turcs que les lois de l'Alcoran, VOLT. Moeurs, 93.
   Être méprisé de ceux avec qui l'on vit est une chose que personne n'a jamais pu et ne pourra jamais supporter ; c'est peut-être le plus grand frein que la nature ait mis aux injustices des hommes, VOLT. Trait. métaph. ch. 9.
   Si vous ne reconnaissez point de Dieu, quel frein aurez-vous pour les crimes secrets ?, VOLT. Honnêt. littér. 27.
   Mettre un frein à sa langue, s'abstenir de parler par prudence ou par honnêteté.
   Terme d'anatomie. Nom de certains ligaments, qui brident ou retiennent une partie. Le frein de la langue.
   Le frein du prépuce, petit repli qui unit le prépuce au gland.
   Les freins de la glande pinéale, ses pédoncules supérieurs.
   Terme d'entomologie. Crochet de l'aile des lépidoptères.
   Cerceau autour du rouet du moulin à vent, qui arrête le moulin par le moyen d'une bascule.
   Terme de mécanique. Appareil pour modérer ou détruire la vitesse d'un mécanisme. Le frein d'une locomotive.
   Frein dynamométrique, appareil pour mesurer le travail des moteurs.
PROVERBE À vieille mule frein doré, se dit pour se moquer d'une vieille qui se pare pour faire la jeune.
   XIe s.
   Li frein sont d'or, les selles d'argent mises, Ch. de Rol. VII.
   XIIe s.
   Donc [il] laisse courre à plein fren estendu, Ronc. p. 60.
   La cruiz [croix] arcevesqual fist porter à sa destre, E la reisgne [rêne] del frein tint en la main senestre, Th. le mart. 38.
   XIIIe s.
   À tant es vous un musart qui le prit par le frain et le vot [voulut] retourner ariere, Chr. de Rains, 118.
   Que la premeraine vertu, C'est de metre en sa langue frain, la Rose, 7089.
   Pren durement as dens le frain, Et donte ton cuer et refrain, ib. 3079.
   Cil qui ensuit sa volenté sanz frain de raison, vit à loi de beste sanz vertu, BRUN. LATINI Trésor, p. 337.
   Frains d'or ne fait meillor cheval, BRUN. LATINI ib. p. 457.
   XIVe s.
   Il estoit li premiers au frein de l'ainsné filz du roy [son premier gouverneur], dans MORÉRI, Moreuil Bernard, 6e du nom.
   XVe s.
   Quand le sire de Bauderoden les vit venir, il tourna son frein tout sagement, et fit chevaucher son pennon et ses compagnons pour revenir au pont...., FROISS. I, I, 139.
   Or nous faut prendre le frein aux dents, FROISS. II, II, 152.
   Tout esdenté, mon frein me fault rongier, CH. D'ORL. Ball. 132.
   XVIe s.
   Nostre ame ne sçauroit de son siege atteindre si hault ; il faut qu'elle le quitte et s'esleve, et, prenant le frein aux dents, qu'elle emporte et ravisse son homme si loing, qu'aprez il s'estonne luy mesme de son faict, MONT. II, 22.
   Provenç. fren, fres ; catal. fre ; espagn. et ital. freno ; portug. freio ; du lat. frenum, qui se rapproche naturellement de fretus, soutenu, garni ; c'est le radical sanscrit dhar, tenir, porter.
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frein 2.
(frin) s. m.
Vieux terme de mer. Vagues qui se brisent contre un obstacle.
   Ce mot devrait être écrit fraint (voy. l'historique et l'étymologie).
   XVIe s.
   La premiere soirée et tout le lendemain les frains de la mer, qui estoit rude, firent que le comte ne pust faire descente, D'AUB. Hist. II, 86.
   La sentinelle ne pouvant les ouir à cause des freins de l'eau et du grand bruit qu'elle fait en cet endroit, D'AUB. ib. II, 374.
   Lat. frangere, qui avait donné, dans l'ancien français, fraindre, participe fraint.

Dictionnaire de la Langue Française d'Émile Littré. . 1872-1877.

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